Bruxelles veut responsabiliser chaque État sur les OGM

Par latribune.fr  |   |  524  mots
Après avoir tenté de rentrer par la porte, Bruxelles essaie à présent de passer par la fenêtre dans le dossier des OGM. La Commission européenne veut débloquer les autorisations de culture de plantes génétiquement modifiées dans l'Union. Elle va proposer ce mardi une renationalisation des décisions, en permettant aux Vingt-Sept de décider par eux-mêmes, chacun de leur côté, de cultiver ou non des OGM sur leur territoire. La stratégie de John Dalli, le commissaire européen à la Santé et à la Politique des consommateurs, consiste à conclure un accord avec les pays réfractaires aux OGM. Il leur propose de leur laisser le choix de ne pas en cultiver, même si ces cultures font l'objet d'un aval européen, à condition que ces pays cessent de bloquer les autorisations de mise en culture au niveau européen. La Commission a récemment donné son feu vert à la culture de la pomme de terre Amflora à des fins industrielles et à la commercialisation de maïs génétiquement modifié. Mais ces autorisations ont ensuite été bloquées au niveau des ministres européens, faute de majorité qualifiée. Le maïs MON 810 de Monsanto est à ce jour le seul produit autorisé à la culture en Europe. Six pays, dont la France, l'ont interdit et sont ainsi exposés à des poursuites de la part de la Commission. « deal » peu enthousiasteLe « deal » mis sur la table par la Commission ne suscite pas l'enthousiasme. Bruno Le Maire, le ministre français de l'Agriculture, est réticent à cette forme de libéralisation des cultures OGM. « Nous souhaitons que les décisions continuent à être prises au niveau communautaire », a-t-il déclaré lundi à Bruxelles. Une dizaine d'autres pays européens partageraient cette position. De même que le faucheur d'OGM José Bové, qui pointe le problème du marché intérieur : « Quelle concurrence entre l'agriculteur bio d'un pays qui interdit les OGM et celui d'un pays qui les autorise ? », se demande l'eurodéputé Europe écologie. Pour l'UMP Michel Dantin, « le fait de renvoyer la décision aux États alors que les biens alimentaires circulent partout en Europe est une fausse bonne solution ». De l'aveu d'un responsable européen, ce dossier hautement impopulaire des OGM a déjà « pourri » le premier mandat de José Manuel Barroso. Le président de la Commission s'obstine cependant. Les enjeux industriels sont considérables : BASF aurait menacé de quitter l'Allemagne si l'autorisation de Bruxelles pour Amflora n'avait pas été accordée. Pris en tenaille entre le lobbying des agro-semenciers, de Berlin et de Washington, et les inquiétudes des mouvements écologistes, d'une majorité des gouvernements européens et de l'opinion publique, José Manuel Barroso se range derrière les avis scientifiques de la très contestée Autorité européenne de Sécurité des Aliments. L'agence est théoriquement indépendante, mais ses détracteurs accusent ses experts d'être liés aux multinationales du secteur. La Commission a annoncé un audit des experts à l'avenir, « pour vérifier leur indépendance ». Dans sa logique, la Commission n'impose rien : elle propose, sur des bases scientifiques, et les États disposent.