Lafarge reste sous la pression des marchés

Depuis plusieurs mois, Lafarge est la lanterne rouge du CAC 40. Certes, le titre pâtit de son aspect cyclique. Mais c'est avant tout sa dette et la menace d'une dégradation en « junk bond » (obligation pourrie) par Moody's qui l'a poussé vers un plus-bas annuel à 36,29 euros cet été. Son rebond depuis le 31 août est lié au fait que Moody's, elle encore, a précisé qu'elle ne changerait pas la note du numéro un mondial du ciment.Lafarge a fait les frais de l'aversion du marché pour les groupes trop endettés en période de crise. Il n'empêche ! Réduire sa dette nette, qui atteignait 15,16 milliards d'euros à la fin du premier semestre, reste pour Lafarge un impératif. Première à dégainer, fin juin, l'agence de notation Standard and Poor's a placé le groupe sous perspective négative. Fitch a confirmé la note long terme du cimentier à BBB? avec perspective négative le 14 juillet. Puis Moody's a placé sa notation Baa3 sous revue le 3 août en vue d'une possible dégradation, avant de lever le 31 août cette surveillance. Si les trois agences soulignent les positions solides de Lafarge et sa présence dans des marchés émergents parfois volatils mais recelant de forts potentiels de croissance, toutes notent que sa structure bilantielle risque de tarder à s'améliorer. S&P rappelait fin juin que l'excédent brut d'exploitation de Lafarge a chuté de 22 % en 2009. Or les conditions de marché vont rester difficiles et la demande pour la construction neuve faible. Le paiement du dividende et d'une amende de 339 millions d'euros (intérêts compris) pour pratiques anticoncurrentielles sur le marché des plaques en plâtre risque, en outre, de retarder le rétablissement des ratios de crédit pour le groupe, sachant que son ratio cash-flow/dette nette qui atteignait 32 % fin 2007, est retombé à 16 % fin 2009. Dans le même temps, fin août, Moody's notait que le groupe devrait renouer avec un ratio compatible avec une notation « investment grade » à la mi ou à la fin 2012. Le lourd endettement de Lafarge n'est pas lié à des opérations hasardeuses mais à l'achat fin 2007, pour 8,8 milliards d'euros, du cimentier égyptien Orascom qui a permis au groupe français de se bâtir un empire autour de la Méditerranée. Mais la crise financière conjuguée au retournement économique et à l'effondrement des marchés de la construction neuve a tout à la fois compliqué et rendu plus nécessaire son désendettement. Pour autant, Lafarge, qui dispose de 3,8 milliards d'euros de lignes de crédit, « n'est pas au bord du dépôt de bilan, note Emmanuel Bulle, analyste crédit chez Fitch, d'autant que les cimentiers génèrent traditionnellement un cash important. Mais une éventuelle dégradation de ses notations hors de la catégorie ?investment grade? renchérirait son coût de financement [de 55 millions d'euros, Ndlr] ». « La situation financière est tendue, mais n'a rien de dramatique : Lafarge est desservi par le fait que la conjoncture est encore très dégradée et que les actifs achetés à Orascom ne produisent pas encore beaucoup de cash-flow. Pour peu que ces deux termes de l'équation s'améliorent, son bilan s'en trouverait amélioré », renchérit un banquier. « Lafarge a profondément allongé la maturité de sa dette, ce qui lui permet d'abaisser la pression d'autant, renchérit une autre source bancaire. En outre, ses pairs, l'allemand Heidelberg Cement ou le mexicain Cemex, vivent sans encombre avec une signature ?non investment grade?, sachant que le marché de la dette de ce type [high yield], qui était totalement fermé il y a un an, s'est complètement rouvert. »
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