Comment la crise a durablement bouleversé nos habitudes de consommation

Par latribune.fr  |   |  820  mots
Durabilité, proximité et responsabilité, telles pourraient être les valeurs-clés de la consommation dans les années à venir. Et les consommateurs de demain seront un peu plus âgés, plus connectés et plus rationnels d\'après les conclusions d\'analystes réunis fin novembre par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF). En somme, nous irions vers une accentuation des tendances apparues depuis 2008. Voici une explication chronologique de ce phénomène.1960-2008, ou \"l\'existentialisme du panier à courses\"Sur la période allant des années 1960 à 2008, la consommation de cessait de croître à mesure que les revenus augmentaient. Nous étions dans une période de croissance régulière, une crise durait au maximum 18 mois. Olivier Géradon de Véra, vice-président du cabinet SymphonyIRI, appelle la logique qui régnait alors : \"l\'existentialisme du panier à course\" soit une consommation quantitative; l\'acheteur existe par ce qu\'il consomme, dans l\'immédiat. Les dépenses en matière de produits de consommation courante (l\'alimentation, le logement, l\'habillement, l\'énergie...) sont alors peu élastiques, en revanche, celles consacrées aux Nouvelles Technologies d\'Information et de Communication (NTIC) et aux loisirs présentent une élasticité supérieure à 1, c\'est-à-dire qu\'elle varient sensiblement en fonction des revenus.2008, le difficile réveilEn 2008, coup de tonnerre sur la planète consommation. Les achats se font brutalement beaucoup plus rationnels, la consommation est plus frugale. Il s\'agit désormais de \"consommer moins pour consommer mieux \", décrit Olivier Géradon de Véra. De nouvelles valeurs, liées au contexte de crise, s\'ancrent dans l\'inconscient collectif : les notions de futur, de durabilité et de proximité. En matière de consommation, il y a donc un avant et un après 2008. La crise économique et financière a marqué un tournant dans les habitudes d\'achats et les consommateurs ne devraient pas faire machine arrière. Cet événement mondial aux conséquences économiques, sociales et politiques, est différent de crises précédemment apparues. Cette fois, la crise dure... et n\'en finit pas d\'accentuer ces modifications du comportement des consommateurs.Elles vont de pair avec la prise de conscience écologique et se traduisent par un regain de l\'intérêt pour les produits locaux, le \"made in France\". Ce qui est proche géographiquement véhicule une image rassurante, et ce qui est lointain est porteur de craintes. Le \"fait maison\" rassure, les produits \"écologiques\" et \"responsables\" font écho à la notion de futur, de durabilité. La crise de 2008 a provoqué une prise de conscience de la notion de \"durable\" et ceci a imprégné la consommation. De plus, l\'apparition de conséquences néfastes de la mondialisation (délocalisation, faillite du système financier...) provoque une angoisse du consommateur, qui cherche à être rassuré par un lien de proximité, lien très inscrit depuis 2008. \"D\'où le succès des AMAP (Associations pour le Maintien d\'une Agriculture Paysanne), des Fêtes de voisins et même des réseaux sociaux\", considère Olivier Geradon de Véra.2009-2017, proximité, système DLa baisse générale des revenus poussent les consommateurs à davantage se tourner vers l\' \"économie grise\" soit le marché de l\'occasion, du troc, comme en témoigne par exemple le succès depuis quelques années du site d\'échange entre particuliers LeBonCoin.fr.Les produits de consommation courante connaissent toujours une élasticité faible mais le changement concerne les NTIC. Désormais, ce poste de consommation est peu élastique : payer son forfait de téléphonie mobile et un abonnement Internet est devenu, pour beaucoup de ménages, une dépense incompressible, à l\'image de celle consacrée à l\'énergie.2018-2030, un mix des habitudes de consommation entre générations ?\"Nous allons vers un nouveau modèle économique de consommation\", résume Olivier Geradon de Véra. Pour la période 2018-2030, \"l\'augmentation de l\'espérance de vie fait que ce ne seront plus trois mais quatre générations qui coexisteront\". Il prévoit une propagation horizontale des comportements, un effacement des barrières entre générations. Le transfert d\'habitudes de consommation seraient alors bien plus courant, et ces changements sont déjà amorcés: de plus en plus de seniors se mettent à l\'informatique, au téléphone mobile, quant leurs petits-enfants se passionnent pour des émissions de télévision où la cuisine -activité séculaire- est reine.De plus, \"dès 2020, se loger deviendra encore plus problématique\", avance l\'expert. Le logement coûtera toujours cher et ceci se répercutera sur les dépenses les plus élastiques : les loisirs.Reste une inconnue: l\'évolution du pouvoir d\'achat et sa répartition au sein de la population.