Carburant : le conflit s'envenime dans les raffineries de Total

Parti de la raffinerie de Dunkerque, à l'arrêt depuis septembre, le mouvement de protestation des employés des activités de raffinage de Total s'est fortement intensifié des derniers jours. Jeudi, les salariés du secteur, en grève depuis la veille, se sont prononcés en faveur d'une poursuite illimitée du mouvement dans les six raffineries françaises du groupe, avec un arrêt total des installations, pour obtenir des reponses claires sur l'avenir de leur activité. Selon la CGT, cette action, très suivie, devrait prochainement aboutir à une pénurie de carburants. La direction du groupe pétrolier a fermement réfuté cette prophétie : « À ce stade, il n'y a pas de risque de pénurie ». La ministre de l'Économie, Christine Lagarde, a fait passer un message de la même eau. « Il n'y a pas de risque de pénurie. Ce n'est vraiment pas un argument qu'il faut utiliser », a-t-elle affirmé sur France Info vendredi, à la veille du chassé-croisé des vacanciers sur les routes.Perturbations localesÀ court terme, si des perturbations locales ne sont pas à exclure, l'hypothèse d'une pénurie généralisée ne semble en effet pas d'actualité. Avec ses six raffineries françaises, Total ne représente qu'un peu plus de la moitié de la capacité de production de produits raffinés, qui s'établit en tout à 98 millions de tonnes (Mt). Conjointement, Esso (Exxon Mobil), Petroplus, Lyondellbasell et Ineos disposent de capacité de raffinage presque identiques à celle de Total. Qui plus est, l'approvisionnement des quelque 5.000 stations-service françaises dépend pour l'heure des dépôts de carburants (que les raffineries alimentent).« Ce qui est déterminant dans un premier temps, c'est le niveau des stocks»», souligne le porte-parole du raffinage de Total, Michaël Crochet-Vourey, qui refuse évidemment de préciser les quantités stockées par le groupe. Pour le président de l'Union française des industries pétrolières (Ufip), Jean-Louis Schilansky, il n'y a donc pas lieu de s'inquiéter d'une éventuelle pénurie. « Il y a entre dix et vingt jours de consommation de produits finis dans les dépôts », fait-il observer.Extension du mouvementMais chez Total, le mouvement a justement commencé à déborder des seules raffineries du groupe. « Sept gros dépôts sont en grève et n'expédient plus rien », indique le délégué syndical central CGT du groupe, Éric Sellini. Encore limités (Total compte 31 dépôts, la France 160), ces blocages pourraient toutefois entraîner des perturbations dans les régions les moins bien équipées. « Qu'il y ait ponctuellement des tensions locales, c'est possible », reconnait le directeur de la communication de l'Ufip, Yves Le Goff.Le durcissement du mouvement chez Total risque en tout cas de rendre problématique le maintien du calendrier prévu par le groupe pour communiquer avec ses salariés autour de la question du raffinage en France. Total, qui affirme perdre 100 millions d'euros par mois sur ses opérations françaises, n'a pas exclu des ajustements ultérieurs sur sa capacité dans l'Hexagone, tout en précisant, vendredi, qu'« aucune autre raffinerie du groupe en France [hormis celle de Dunkerque, Ndlr] n'est concernée par un projet de fermeture ». Politiquement sensibleLa question de l'avenir du raffinage en France et du site de Dunkerque doit normalement être abordée lors d'un comité central d'entreprise le 29 mars prochain. Soit après les élections régionales, alors que la problématique est politiquement sensible, comme l'a montré vendredi une nouvelle communication du ministre de l'Industrie, Christian Estrosi. L'homme politique, qui doit rencontrer le directeur général de Total, Christophe de Margerie, ce week-end, a souligné qu'« il est hors de question en l'état de fermer la raffinerie des Flandres, ni, évidemment, d'en fermer aucune autre en France ». La CFDT a plaidé pour avancer la réunion à la première semaine de mars. « Pour débloquer la situation, un élément serait d'avancer la date du CCE », ajoute Éric Sellini. Total n'a pas souhaité faire de commentaire sur le sujet. En attendant un éventuel déblocage des négociations, les syndicats n'ont pas l'intention de relâcher la pression. La CGT, notamment, a appelé les employés des deux raffineries d'Esso (20 % des capacités françaises) à rejoindre le mouvement.
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