Brésil et Turquie testent les limites de la guerre des monnaies

Le piège s'est refermé sur le Brésil, comme il risque de prendre dans sa nasse ses voisins latino-américains. Première décision économique majeure de l'ère Dilma Rousseff : le Copom, le conseil de la Banque du Brésil, s'est trouvé acculé à une hausse des taux qui va à l'encontre des objectifs recherchés par les interventions de change à répétition et la multiplication des mesures de contrôle des mouvements de capitaux. Son taux directeur, le Selic, a été majoré d'un demi point à 11,25 % et ce ne serait que le début d'un cycle qui l'entraînerait à 12,25 % au début du printemps, selon les prévisions de Barclays Capital. Les taux brésiliens sont ainsi redevenus les plus élevés du G20, ce qui ne manquera pas de renforcer le pouvoir d'attraction du real auprès des investisseurs étrangers que les contrôles renforcés avaient un moment dissuadés de se porter sur la monnaie brésilienne. En cherchant à contenir la hausse du real, qui s'est envolé de 38 % face au dollar depuis début 2009, pour préserver sa compétitivité internationale, le Brésil a importé de l'inflation. Celle-ci est remontée au plus haut depuis six ans, à 5,9 % l'an dernier, bien au-delà de l'objectif officiel de 4,5 %. L'hydre des années 80, l'ennemi public de l'époque, est ressortie du bois et plus que tout autre pays du continent sud-américain, le Brésil refuse de jouer avec le feu.Guerre contre-productiveÀ l'autre extrême, la Turquie, engagée dans le même combat que le Brésil pour calmer la fièvre sur sa livre, a bravé les éléments et les marchés qu'elle a pris totalement à revers. En dépit d'une inflation anticipée de 6,6 % en rythme annuel cette année, restant fidèle à son dogme, la banque centrale d'Ankara a annoncé jeudi une nouvelle baisse de son taux directeur, réduit d'un quart de point à 6,25 %. Avec des taux d'intérêt réels - défalqués de l'inflation - qui s'enfoncent en territoire négatif, la Turquie risque de payer la double peine. Une inflation qui s'accélère, avec une livre qui continue à monter à moyen terme, puisqu'à l'échelle internationale, les rendements dont elle est assortie restent très attractifs. Même si, après six mois de hausse ininterrompue, la monnaie turque a cédé 5 % face au dollar depuis la première baisse des taux mi-décembre. Ce double épisode montre à quel point la guerre des monnaies peut être contre-productive. Guerre à laquelle participent nombre de pays d'Asie, à commencer par la Chine qui maintient son yuan en état de sous-évaluation manifeste, mais aussi indirectement les Etats-Unis, via la politique d'assouplissement quantitatif, faisant fonctionner à plein la planche à billets.
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