Développé en Inde... Produit en Allemagne

«Un nouvel ordre mondial.» Voici comment le Boston Consulting Group (BCG) qualifie la percée des entreprises des pays émergents. Le cabinet d'études, qui liste 100 grandes entreprises des pays émergents, fait un constat simple : ces « challengers » sont devenus des concurrents et des partenaires obligatoires pour les groupes des pays développés. Avec un chiffre d'affaires annuel moyen de 26,5 milliards de dollars (2011-2013), ils font mieux que les 20 milliards des entreprises du S&P500 (500 grandes sociétés cotées sur les Bourses américaines). On connaissait les géants pétroliers PetroChina et Petro-Bras. « Tous les secteurs sont touchés », explique Olivier Scalabre, de BCG. Dans l'agroalimentaire, où l'indonésien Indofood fait une percée remarquée grâce à une classe moyenne naissante. Dans les services, où China UnionPay concurrence Visa dans une centaine de pays avec son réseau de paiement par carte bancaire.La Chine, en construisant la ligne ferroviaire à grande vitesse la plus longue du monde, a démontré sa capacité à produire des technologies de pointe. Car cette prise de pouvoir des émergents passe par le progrès technologique. Grâce aux efforts consentis dans la R&D, ces pays ne sont plus uniquement des ateliers. Et la conséquence, impensable il y a encore deux décennies, se trouve dans la modification de la structure des rapports entre « challengers » et entreprises occidentales.En témoigne le partenariat scellé en juin dernier entre le géant allemand Merck et l'indien Dr Reddy's Laboratories, qui porte sur le développement et la fabrication de médicaments génériques à haute valeur technologique contre le cancer. L'indien se chargera du développement, et l'allemand de la production.Des partenaires à traiter « d'égal à égal »« Les technologies ne sont plus l'apanage des Occidentaux », constate Olivier Scalabre. Faut-il y voir un danger ? Pas seulement, selon le spécialiste, car « ce nouvel équilibre génère des opportunités nouvelles ». Et de citer l'exemple de Daimler et BYD. En 2010, le constructeur automobile allemand et le fabricant de batteries chinois ont formé un partenariat pour développer un véhicule électrique. Le premier modèle qui en est issu a été dévoilé en avril à Pékin. Ces nouveaux arrivants sont donc autant de partenaires potentiels pour développer des projets. À condition de traiter avec eux « d'égal à égal », met en garde Olivier Scalabre. Sans compter qu'ils ont consommé 1.700 milliards de dollars de biens et services en 2011. Une manne pour les entreprises occidentales.Pour autant, un tel renversement a des effets négatifs. Le dumping social pratiqué par ces pays fait déjà perdre des marchés aux Occidentaux. Leurs pratiques à l'international sont très agressives. Mais, comment y répondre ? Karel de Gucht, le commissaire européen au Commerce extérieur, brandit ses accords de libre-échange, exigeant plus de réciprocité en matière de production et de commerce. « Mais c'est compliqué », concède-t-il. D'autant que Bruxelles, qui exclut toute aide publique, se refuse à soutenir les entreprises européennes. Cette nouvelle concurrence laisse peu de marge de manœuvre pour les entreprises occidentales, si ce n'est de coopérer.
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