La musique veut voir en 2010 l'année charnière

L'an dernier, à l'ouverture du Midem, « La Tribune » titrait « La musique en passe de réussir sa mutation » et notait que le secteur abordait 2009 « avec espoir ». Un an et une grave crise économique plus tard, alors que d'autres contenus culturels, cinéma, livre, presse plongent à leur tour dans l'inconnu de la distribution dématérialisée, cet « espoir » est remis au lendemain. La mue de la musique vers la distribution de musique par les réseaux numériques est largement entamée. Mais, à part le succès mondial d'iTunes, elle cherche encore son modèle. La musique est en quête de nouvelles sources de revenus, dans le spectacle, les produits dérivés, l'alliance publicitaire avec les marques... Les visiteurs, au nombre de 8.000 en 2009, déjà en recul depuis deux ans, se feront encore un peu plus rares sur la Croisette cette année. Surtout, leur profil a changé. Marques et agences de publicité, qui cherchent à travers la musique un vecteur adapté à la communication sur Internet, opérateurs mobiles, plate-formes de diffusion de la musique en ligne, sont désormai chez eux au Midem, aux côtés des labels musicaux et éditeurs de musique (détenteur des droits sur des chansons). Redressement des ventes de CD en FranceCôté français, l'ambiance au sein de la filière est mitigée. Le redressement spectaculaire des ventes « physiques », CD-DVD, qui permet de conclure l'année sur un recul limité à 3,4 %, au lieu de 21 % au premier semestre ou moins 15 % en 2008 met forcément du baume au coeur des labels. Certains y voient l'effet psychologique du vote des lois de lutte contre le piratage, qui inciteraient au retour vers l'achat de musique. D'autant que les ventes de titres par téléchargement décolle enfin, portées notamment par le succès de l'iPhone en France avec l'intégration directe de la boutique iTunes d'Apple. Le marché « numérique » pèse 13 % du total. Des signaux bienvenus car l'année a été éprouvante pour bien des acteurs, y compris les indépendants considérés comme solides. Vincent Frèrebeau, président de l'Union des producteurs indépendants (UPFI), admet que, pour la première fois en sept ans d'existence, son label Tôt ou Tard finira l'année en perte. Et le nouveau record de part de marché, autour de 40 %, que devrait s'octroyer le numéro un, Universal Music, tient sans doute aussi à la faiblesse des concurrents. Autres éléments qui pourraient faire de 2010, enfin, « l'année charnière » : après le vote des lois de prévention du piratage, l'installation, sous l'égide d'une magistrate, de l'Hadopi, autorité qui veillera à leur mise en oeuvre des ces lois. Et encore, l'annonce d'un élargissement du crédit d'impôt à la production dont davantage de labels pourront bénéficier ou la mise en place d'une carte jeunes qui offrira un tarif réduit pour la musique sur Internet, proposée par la mission Zelnik sur la « création et Internet ». Division de la filière en FranceMais cette mission est aussi en train de raviver une profonde division au sein de la filière. Tous les producteurs et les nouveaux distributeurs en ligne, comme Believe Digital, sont vent debout contre la proposition de transférer leurs droits sur la musique en ligne à une société de gestion collective, se substituant à la négociation commerciale entre producteurs et plate-formes de musique en ligne auxquelles ils confient leurs catalogues. Les managers d'artistes, les sociétés de gestion de droits des interprètes y sont, eux, favorables. Le débat s'est personnalisé entre Patrick Zelnik, auteur du rapport, et patron du label Naïve, et David El Sayeg, directeur général du Syndicat national des éditeurs phonographique (Snep), qui a sous-entendu que ce dispositif arrangeait les affaires de Naïve, en retard sur le numérique. Patrick Zelnik a rétorqué dans « L'Express », que la concentration du marché entre les majors (Universal, Sony, EMi, Warner) était aussi responsable de la faiblesse des ventes numériques que le piratage, et que « le Snep rabaissait le débat au niveau du caniveau ». Frédéric Mitterrand devra faire le pompier au déjeuner qu'il organise dimanche 24 à Cannes avec la profession.
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