La notation de la dette souveraine japonaise

Nouveau coup de canif dans la solidité légendaire du Japon. Jeudi, l'agence de notation Standard & Poor's a abaissé d'un cran, de AA à AA-, la note de la dette souveraine de l'archipel. C'est la première fois que cette note est baissée depuis 2002. Le pays avait déjà perdu son AAA en 1998. Cette décision met le Japon au même niveau que la Chine dans cette catégorie. Elle ne pouvait pas plus mal tomber pour le gouvernement de Naoto Kan, qui peine actuellement à faire adopter le budget pour l'année fiscale 2011-2012, qui débute en avril, à la Diète. « Le gouvernement manque d'une stratégie cohérente pour traiter la dynamique de la dette du pays », a expliqué avec acidité l'agence dans un communiqué. Derrière cette phrase se cachent la lassitude et l'inquiétude de ses analystes à constater que, depuis vingt ans, l'archipel laisse filer sa dette. Décision « regrettable »Si elle est vertigineuse (elle représente près du double du PIB, soit le ratio le plus élevé de l'OCDE), au moins est-elle à 95 % aux mains des Japonais, expliquent les optimistes. Dans cette situation, la Banque du Japon impose aux opérateurs financiers nippons des taux quasi nuls, rendant le service de la dette en apparence bénin (à 10 ans les taux sont à 1,25 %, soit un des taux les plus faibles du monde industrialisé). Mais tout indique que cette situation va empirer. « Dans quatre ou cinq ans le Japon sera forcé de se tourner vers les marchés mondiaux pour se financer. Qui voudra d'un produit à rendement nul ? » s'interrogeait Patrick Artus lors d'une récente visite au Japon. « L'intérêt des obligations du Japon est certes très faible, mais c'est le prix d'un risque lui-même faible. Je n'ai pas d'inquiétude sur les capacités du Japon à trouver preneur pour sa dette », estime Guy Sorman, de passage actuellement à Tokyo. Le ministre de l'Économie, Kaoru Yosano, a estimé jeudi que la décision de l'agence était « regrettable ». En un sens, il est le symbole de la déconfiture des finances publiques de l'Archipel : c'est lui qui, ministre des Finances d'un précédent gouvernement, avait promis de ramener à l'équilibre le budget primaire (hors service de la dette) du Japon en 2011, avant de reconnaître plus tard que c'était impossible. Aujourd'hui le gouvernement s'est fixé le même objectif pour... 2020. Le budget 2012 en discussion actuellement est marqué par le même laxisme que celui des gouvernements précédents : 41 % du budget, ou 38.000 milliards de yens, sera couvert par de la nouvelle dette. Et le ministère des Finances prévoit déjà d'émettre pour 50.000 milliards l'an prochain.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.