Chypre : les banques ont rouvert leurs portes pour quelques heures

Elles seront restées fermées douze jours. Toutes les banques -placées sous haute surveillance pour l\'occasion- à Chypre se sont rouvertes pour six heures ce jeudi à midi, après l\'adoption de restrictions inédites dans la zone euro, censées limiter les effets d\'une éventuelle panique bancaire. Des dizaines de personnes commençaient à faire la queue à moins de 30 minutes de la réouverture.Une cinquantaine de personnes attendaient ainsi devant la Bank of Cyprus dans le centre de Nicosie. Devant les autres établissements, on comptait une dizaine de clients, parfois plus, selon des correspondants de l\'AFP. Devant la Laïki Bank sur l\'avenue Makarios, la principale artère de la capitale, une douzaine de personnes faisaient la queue. \"Ce sera une très mauvaise journée. Beaucoup d\'insultes vont fuser et les gens vont être très en colère\", a dit l\'un d\'eux, Philippos Philippou, un électricien au chômage.Mais en prévision, des agents de sécurité, certains armés, ont été postés devant les banques locales et étrangères de la capitale, un phénomène nouveau dans ce pays. De son côté, l\'Association des banques a appelé le public à faire preuve de \"patience et de compréhension\" lors de leurs transactions aux guichets avec les employés de banques.Les employés de banques craignent les débordementsA la veille du jour J, l\'inquiétude a grandi sur l\'île en récession depuis deux ans. En cette fin de mois, beaucoup se demandent quand ils vont pouvoir être payés et des centaines de personnes ont encore manifesté contre le plan de sauvetage obtenu au prix d\'une restructuration drastique du système bancaire. Craignant des débordements, le syndicat des employés de banque, Etyk, a appelé la population à ne pas faire retomber sa frustration sur eux. \"En tant qu\'employés de banque, nous ne sommes pas responsables mais au contraire, les collègues sont eux-mêmes victimes d\'actes et/ou d\'omissions criminels qui ont conduit à ce désastre et placent beaucoup de gens dans une situation très tragique\", a-t-il souligné dans un communiqué.Lourdes restrictions sur les mouvements de capitauxL\'accord conclu lundi entre Chypre au bord de la faillite et la troïka (Union européenne, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international) prévoit notamment la liquidation de la Laïki et l\'absorption d\'une partie de ses activités par Bank of Cyprus. Actuellement, les clients de ces deux banques, disposant de 40% des dépôts, ne peuvent retirer respectivement que 120 et 100 euros par jour. L\'ouverture des banques s\'accompagne de lourdes restrictions pour les mouvements de capitaux. Les paiements et virements à l\'étranger sont limités à 5.000 euros par mois, par personne et par banque et les voyageurs quittant l\'île ne pourront porter sur eux plus de 1.000 euros en espèces. Le décret ministériel justifie ces mesures en évoquant \"le manque de liquidités conséquentes et le risque important de fuite des dépôts, avec pour résultat possible l\'effondrement des institutions de crédit\" et des \"réactions en chaîne\" menaçant \"l\'économie dans son ensemble\".Pour faire face à la demande, plusieurs conteneurs chargés d\'argent liquide sont arrivés mercredi soir à la banque centrale à Nicosie, a constaté un photographe de l\'AFP. Selon les médias, ils pourraient contenir des milliards d\'euros.Une commission de surveillance du Parlement chypriote a demandé à la Banque centrale de lui fournir la liste des personnes ayant transféré des fonds hors de l\'île avant l\'annonce du plan de sauvetage. En Grèce, pays qui entretient comme la Russie d\'étroits liens économiques et culturels avec Chypre, les agences des trois filiales grecques de Bank of Cyprus, Laïki et Hellenic Bank, ont rouvert après être passées sous contrôle de l\'établissement Piraeus Bank. A Londres, où vivent de nombreux Chypriotes, les agences de Bank of Cyprus et Laïki sont restées ouvertes.\"Malgré les contrôles, les capitaux vont sortir pendant longtemps, peut-être 6 mois\", a estimé Simona Mihai-Yiannaki, professeur à la European University, spécialisée dans la banque, évoquant \"l\'impact psychologique\" des restrictions: \"Les gens pensent \'Nous sommes contrôlés, fuyons\'\". Michalis Sarris s\'est cependant montré optimiste sur les avoirs russes des banques chypriotes. \"Je pense que nous allons voir de larges sorties de liquidités, mais qu\'une partie va rester et une partie va revenir\".L\'Europe sur le banc des accusésL\'Europe a imposé un prix \"trop élevé\" à Chypre, alimentant \"amertume\" et \"colère\", a affirmé le ministre chypriote des Affaires étrangères Ioannis Kasoulides. \"Nous devons recommencer à zéro\", comme après l\'invasion turque de 1974. \"Nous allons connaître des jours pires en 2013 (...), l\'économie va connaître une récession encore plus profonde\", a prévenu le ministre des Finances, Michalis Sarris, à la télévision.Yves Mersch, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE), s\'est pour sa part voulu rassurant, affirmant jeudi que la solution choisie pour le sauvetage de Chypre \"n\'est pas un modèle\" applicable à d\'autres pays de la zone euro. \"Il s\'agit plutôt de mesures spécifiques adaptées à une situation véritablement exceptionnelle\", explique M. Mersch dans une interview à paraître jeudi dans le quotidien économique espagnol Expansion. \"Il nous faut envoyer un message clair aux investisseurs et épargnants internationaux sur le fait que leur argent est en sécurité dans la zone euro\". 
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