Divorce à la tête de Vivendi : Jean-Bernard Lévy quitte le groupe

Le divorce. Travaillant main dans la main depuis dix ans à la tête de Vivendi, depuis l\'éviction de Jean-Marie Messier en pleine crise de trésorerie à l\'été 2002, Jean-Bernard Lévy et Jean-René Fourtou se séparent sur un profond désaccord. Suite à « une divergence sur l\'évolution stratégique » plus exactement comme l\'explique sans détours le communiqué publié par le groupe de médias et de télécoms jeudi soir à l\'issue d\'un conseil de surveillance qui a duré plus de deux heures. Jean-Bernard Lévy quitte ses fonctions de président du directoire qu\'il occupait depuis 2005, après avoir été directeur général. La rumeur avait circulé dès la fin de matinée et l\'action Vivendi, qui a perdu plus du quart de sa valeur en un an, s\'est appréciée de 5,54% jeudi à 14,195 euros, à la perspective de ce départ et des changements sans doute radicaux à venir. «Il y avait une décote de management, une décote Lévy, il faut le dire. Je suis content qu\'il parte» lâche un analyste. C\'est le secrétaire général, Jean-François Dubos, « le gardien du temple » résume un proche du groupe, qui a été nommé jeudi soir président du directoire. De façon transitoire, dit-on dans le groupe, sans que cela soit précisé dans le communiqué. Le directoire, qui était jusqu\'ici de six membres, présidents de filiales, est ramené à deux personnes, le nouveau président et le directeur financier, Philippe Capron. « Sa tentative de créer un groupe industriel n\'a pas marché »Ce départ intervient quelques jours après la tenue du séminaire annuel de Vivendi le week-end dernier, au cours duquel les orientations stratégiques du propriétaire de SFR, Canal Plus, Universal Music, etc, ont été examinées. « Avant le séminaire, personne n\'aurait imaginé qu\'il y aurait un clash, une rupture entre les deux hommes, même s\'il y avait parfois un peu d\'irritation. Mais ça ne s\'est pas bien passé » confie un proche de la direction. « A la fin du séminaire, la corde a commencé à se tendre, les positions à s\'éloigner. Jean-Bernard n\'est pas d\'une grande souplesse » observe cette source. Le président du directoire n\'a pas digéré que le conseil conclut que « sa tentative de créer un groupe industriel n\'a pas marché, les marchés n\'ont pas avalé, le groupe a toujours trop de métiers et il y a peu de synergies. » En témoigne la fameuse décote de holding, qui est revenu au niveau de 2002, lorsque Jean-Marie Messier avait été contraint de quitter ses fonctions, lui aussi. Pas tant à cause d\'une divergence stratégique que de la situation catastrophique des finances du groupe. Lundi, Vivendi a indiqué que les projets du groupe et les « évolutions nécessaires » seraient dévoilés « en temps utile. » Or « Jean-Bernard ne veut pas casser le groupe mais garder ses 150.000 employés » relevait un analyste interrogé il y a deux jours. Agé de 57 ans, X-Télécom, Jean-Bernard Lévy est un ancien de chez Matra ; il fut Directeur du Cabinet de Gérard Longuet au Ministère de l\'Industrie de 1993 à 1994, puis travailla dans la finance chez Oddo, a été directeur général de Vivendi de 2002 à 2005 puis président du directoire. « Il s\'est pris au jeu, il a cru pouvoir créer un vrai groupe » analyse un fin connaisseur du groupe. « Plusieurs solutions » de cessions possibles En interne, on assure que le scénario définitif d\'évolution stratégique n\'est « pas arrêté » et que « plusieurs solutions sont possibles » et le choix déterminera le profil du remplaçant de Jean-Bernard Lévy. Soit un recentrage sur les cœurs des métiers, en cédant certains actifs « périphériques » comme Activision et Maroc Telecom, « il faudra alors un financier », soit la mise en Bourse de deux blocs médias et télécoms, soit un pur groupe de télécoms qui se lance dans le pays émergents, en cédant les actifs américains (les jeux d\'Activision et la musique) et en rendant indépendant Canal Plus, soit à l\'inverse un groupe « tout-divertissement » en vendant les télécoms (au risque d\'une énorme dépréciation d\'actifs)... Insatisfait de la médiocre performance boursière de Vivendi, Jean-René Fourtou a lui-même posé la question de la nécessité ou pas de séparer les activités du groupe « en deux voire en trois » en mars dernier dans la lettre aux actionnaires, certes cosignée par Jean-Bernard Lévy, mais le président du conseil de surveillance était prêt à aller beaucoup plus loin. « De toute façon, soit Jean-Bernard est d\'accord avec le conseil, soit il part » avait lancé un proche de la direction, peu avant le séminaire. Si le nom de Thierry Breton (l\'ex-patron de France Télécom et actuel PDG d\'Atos) pour le remplacer a pu circuler, des sources proches du groupe « n\'y croient pas. » Quant à Vincent Bolloré, qui devrait détenir 4% à 5% du capital après le rachat de ses chaînes Direct 8 et Direct Star par Vivendi et que Jean-René Fourtou a ouvertement invité à siéger au conseil de surveillance, « il n\'est pas acteur du tout de cette histoire, il n\'était pas au séminaire, il n\'est pas au conseil » dément catégoriquement un proche de la direction. La piste Bertrand Méheut, le redresseur de Canal Plus, qui s\'était posé en solution de secours chez SFR, semble aussi écartée à ce stade. Michel Combes n\'ira pas finalement chez SFREn attendant, ce n\'est pas que Vivendi qui se retrouve sans tête, c\'est aussi sa plus grosse filiale, SFR, dont Jean-Bernard Lévy avait pris la présidence par intérim à la fin mars, lorsque Frank Esser a jeté l\'éponge. Michel Combes, le patron de Vodafone Europe, qui avait été nommé le 2 mai dernier comme nouveau PDG de SFR et devait arriver le 1er août, ne viendra pas finalement, comme l\'ont révélé Les Echos. Le groupe a annoncé que Stéphane Roussel, l\'actuel Directeur des ressources humaines de Vivendi et ex-DRH de SFR, serait proposé au conseil d\'administration de SFR comme PDG. « Il connaît bien la boutique et la matière pour mettre en œuvre le plan de réductions de coûts et le plan de départ volontaire en préparation » souligne un cadre de l\'opérateur télécoms. Le plan sera présenté mardi et mercredi prochain en comité d\'entreprise. Un chiffre de l\'ordre de 800 à 1.000 départs est évoqué par les syndicats. 
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