Xavier Beauvois canonise "des hommes et des dieux" sur la Croisette

Par latribune.fr  |   |  371  mots
Avec "Des hommes et des dieux", le réalisateur revient sur le quotidien des moines du village de Tibéhirine massacré en 1996. Il réussit une œuvre magnifique qui va au-delà des religions pour parler de choix moral et de fraternité.

Raconter le quotidien des moines de Tibéhirine, en Algérie, quelques semaines avant leur assassinat en 1996. Le réalisateur Xavier Beauvois, a tenté avec "Des hommes et des dieux" l?un des paris les plus risqués de ce festival. L?un des plus réussis surtout tant ce long métrage, présenté ce mardi soir, en compétition officielle, va au-delà des religions pour parler de choix moral, d?hommes et de fraternité.

Les sept moines de Tibéhirine avaient fait le choix de s?intégrer à la population locale en vivant dans un monastère perché en haut d?un village. Les uns s?occupent des ruches ou du potager, les autres cuisinent, font office d?écrivains publics, soignent les villageois, participant avec joie à leurs fêtes. Et tous prient, chantent, étudient les textes, menant une vie paisible aux côtés de leurs voisins musulmans. Sauf que la guerre se rapproche. Les fondamentalistes égorgent les étrangers de la région, s?invitent au monastère. L?armée, honnie par la population, fait pression pour que les moines rentrent en France alors que les habitants du village n?imaginent pas leur vie sans eux. Alors que faire ? Partir et abandonner leurs frères musulmans? Rester et devenir martyrs de cette guerre? Accepter la protection d?une armée corrompue ?

Ce sont ces dilemmes que filme avec une rigueur pleine de grâce Xavier Beauvois, tout en offrant une plongée au c?ur du quotidien de ces hommes de foi auxquels il rend le plus bel hommage. Son film, jamais mièvre, est calé sur le rythme de la vie monastique. Mais on ne s?ennuie pas une seconde, ici. D?abord parce que les thèmes abordés sont universels. Ensuite parce que le réalisateur rythme l?ensemble de chants liturgiques, de vues de paysages de l?Atlas majestueux (le film a été tourné au Maroc). Et que dire de l?interprétation magistrale des comédiens emmenés par Lambert Wilson et Michael Lonsdale. C?est un véritable chant d?amour qu?offre Beauvois. Le seul à nous avoir réellement touchés jusqu?ici avec le "Biutiful" d?Alejandro Gonzàlez Inarritu.