La naturalisme italien à l'honneur à la Bastille

La Bastille programme jusqu'au 11 mai les deux chefs d'oeuvres de Mascagni et Leoncavallo : Cavalleria rusticana et Pagliacci. L'occasion de se replonger dans le naturalisme italien où le thème de la jalousie est omniprésent.
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Au menu de la Bastille et jusqu?au 11 mai, deux ?uvres majeures de l?opéra italien, les inséparables Cavalleria rusticana de Pietro Mascagni et Pagliacci de Ruggero Leoncavallo. La première a été écrite en 1890 et la seconde en 1892. Deux bijoux de naturalisme et de vérisme qui traitent d?un thème unique : la jalousie. Un thème cher aux compositeurs d?opéras qui de Verdi à Mozart en passant par Tchaïkovsky ont souvent trouvé l?inspiration dans ce tragique sentiment humain. Tragique car il appelle dans tous les cas, la mort prématurée de ceux qui la subisse ou la font naître. Dans Cavalleria rusticana, Turiddu le héros vit avec une jeune fille Santuzza. Très vite on comprend qu?il est épris d?une autre, Lola, mariée à Alfio. Folle de jalousie, Santuzza ira dénoncer Turiddu auprès d?Alfio qui n?aura d?autre but que de tuer le séducteur de sa femme. On côtoie ici les plaines arides de la Sicile. On ne rigole pas avec l?honneur, surtout quand tout le monde sait tout, quand tout se passe dans la rue, théâtre centrale, incontournable de tout ce qui se fait, se dit et se pense. On est ici en pleine tragédie, histoire d?hommes et de femmes qui se terminera forcément mal, qui ne peut pas se terminer autrement.

Mise en abîme
 

Pagliacci est une mise en abîme. Une troupe de comédiens et de clowns s?arrête dans un petit village pour y jouer leur pièce fétiche : L?histoire de Colombine mariée au clown Paillasse qui s?éprend d?Arlequin et projette de s?enfuir avec lui le soir même. Or c?est exactement ce qu?est en train de vivre l?héroïne, Nedda, prête à quitter son clown de mari, Canio le même soir. Mais celui-ci a été averti par un amant éconduit de Nedda et finira, tout en jouant la pièce, par tuer pour de vrai sa femme et son amant. Extraordinaire jeu de rôles où la fiction est intimement mêlée à la réalité. Mais quelle réalité ? Celle de l?opéra, réalité narrative et imaginaire où l?impératif sentimental sera le plus fort. Où le clown jouera son plus beau rôle, un rôle tragique bien sûr.
Dans l?opéra de Mascagni, le metteur en scène, Giancarlo Del Monaco, nous plonge dans une ambiance ascétique, faite de marbre blanc, de lignes fortes, rustiques. Les hommes et les femmes sont condamnés à marcher, marcher toujours vers leur destin, vers Dieu, la justice des hommes et ses ravages. Dans celui de Leoncavallo, on se retrouve dans une ambiance Fellinienne où un public venu en masse gesticule et hurle jusqu?à l?excès, rendant plus insupportable encore la détresse des héros censés le faire rire.

Le Caruso n'est pas loin

Avec tout ce pathos, on aurait pu craindre que la musique des deux compositeurs italiens soit indigeste, dégoulinante de sentimentalisme. Or il n?en est rien. On est captivé par les morceaux écrits pour les ch?urs. Les airs réservés aux deux ténors vedettes (Turiddu/Marcello Giordani et Canio/ Vladimir Galouzine) sont particulièrement émouvants. Et l?on se surprend tout d?un coup à imaginer Le Caruso dans les habits de Paillasse et à retrouver toute l?immense humanité de sa voix. C?est sans doute cela que l?on appelle la modernité : cet art de donner du plaisir avec les ?uvres les plus marquées dans le temps.
 

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