Estampes japonaises

Par Jérome Stern  |   |  429  mots
Erotiques un peu, paysages beaucoup, portraits énormément: les "ukyo-e", impressions polychromes du Japon, ont leurs amateurs depuis la fin du XIXème. Toujours aussi nombreux aujourd'hui. Une vacation propose trois ensembles de grande qualité.

Longtemps fermé aux Occidentaux, le Japon a ouvert ses frontières commerciales vers 1850. De nombreux marchands ont alors entamé des relations avec l'archipel, ramenant notamment les premières estampes en Europe, estampes qui aussitôt ont séduit plusieurs artistes, au point de lancer la mode japonisante et de multiplier les collections: les frères Goncourt les premiers, mais aussi Zola, Degas, Monet, Toulouse-Lautrec ou Van Gogh. Depuis, les amateurs sont nombreux, notamment en France et cet engouement perdure, avec aujourd'hui l'arrivée de jeunes collectionneurs, très connaisseurs.

Dénommés "ukyo-e" (images d'un monde flottant), ces impressions le plus souvent en couleur sont le reflet de la société japonaise, destinées initialement aux populations aisées qui s'échangeaient ainsi des vues rappelant des souvenirs communs, acteurs, paysages, courtisanes, spectacles,... Dans une totale liberté, les artistes (qui collaboraient activement avec les artisans imprimeurs) n'avaient qu'une obligation: travailler rapidement car si une image tirée à des centaines d'exemplaires ne plaisait pas, elle était aussitôt retirée de la vente pour laisser place à une autre. En noir au XVIIème siècle, ces estampes ont été ensuite coloriées à la main puis vers 1765 polychromées avec une planche en bois gravée par couleur.

Les thèmes représentés sont variés: paysages (apparus à la fin du XVIIIème) et moments de la vie courante, mais ce sont surtout les acteurs du théâtre populaire kabuki - les posters d'aujourd'hui -, les femmes, notamment les courtisanes, et les scènes érotiques (non signées) qui remportaient le plus vif succès.

Parmi les principaux artistes, on trouve Maronobu considéré comme le premier maître, les Torii, Harunobu, Utamaro, Sharaku, et plus tardivement, Hokusai et Hiroshige. La valeur d'une estampe dépend de la notoriété de l'artiste, de celle de l'éditeur, du sujet, du nombre d'exemplaires , la qualité du tirage, l'état du papier et de la couleur. Autant d'éléments que seuls les spécialistes et les plus initiés sont aptes à juger: on estime qu'au delà de 200 exemplaires les bois de la gravure commencent à s'user et à rendre le trait moins attractif.

Piasa met en vente le 16 octobre trois collections d'autant plus rares qu'elles sont cohérentes et de qualité, avec notamment un nombre conséquent d'oeuvres originales de Sharaku, actif seulement pendant dix mois entre 1794 et 1795. Les estimations, très raisonnables, de l'incontesté cabinet d'expertise Portier oscillent entre 150 et 3.000 euros en moyenne, avec certaines pièces pouvant aller jusqu'à 30.000 euros.

 

Le 16 octobre, Drouot Richelieu, Paris, salle 4 à 14h, renseignements : www.piasa.fr