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Paris est la capitale des arts primitifs : la vente d'une partie de la collection du grand marchand Jacques Kerchache, qui a été à l'origine du Musée du Quai Branly, en est encore une fois la preuve. Les pièces sont exceptionnelles. Les prix aussi.

Le marché de l'art primitif demeure très actif, surtout à Paris, capitale mondiale en la matière, notamment par les présences du Musée du Quai Branly, des plus grands galeristes, d'experts renommés (qui sont souvent les mêmes marchands et qui présentent la majorité des ventes aux enchères) et de collectionneurs avisés. Mais face à l'envolée des prix et la recrudescence des faux, les amateurs, particulièrement d'art africain haut de gamme, s'attardent en premier sur les objets "à pedigree", ceux dont on connaît l'historique, ceux qui ont été collectés sur place et ont séjourné, longtemps, dans des collections connues.

Tous les deux à trois ans, les salles des ventes parisiennes présentent ainsi des entités remarquables, entraînant des enchères records: la vente du collectionneur Hubert Goldet, celle du surréaliste André Breton, des marchands parisiens Claude et Pierre Vérité, du galeriste belge Pierre Guimot ou du couple américain Rosenthal, marquent encore les esprits et même les catalogues de ces vacations atteignent aujourd'hui des prix élevés tant ils font office de référence.

La vente du 13 juin à Drouot Montaigne par la SVV Pierre Bergé et Associés (PBA) est de ce registre: elle concerne près de 200 lots de la collection Kerchache. Jacques Kerchache (1942-2001) a été un des plus grands marchands spécialisés, mais aussi un découvreur qui allait sur place récolter les objets, entretenant avec les populations locales des rapports très étroits. Passionné (et détesté par nombre de conservateurs et d'universitaires) cet autodidacte a lancé un manifeste "Les chefs d'oeuvre du monde entier naissent libres et égaux" et, à ce titre, soutenu par son ami et autre passionné de peuples tribaux , Jacques Chirac, il a été à l'origine de l'entrée de l'art primitif (Kerchache a inventé le terme d'arts premiers, terme qu'il a par la suite rejeté), d'abord au Louvre (le Pavillon des cessions vient de fêter les dix ans d'exposition dédiée), puis de la création du Musée du Quai Branly, unique au monde.

Ayant "l'oeil", c'est-à-dire sachant d'emblée déterminer la valeur à la fois ethnologique, artistique et esthétique d'un objet, Kerchache a naturellement gardé pour lui nombre de pièces rares, jamais vendues et cette fois mises aux enchères. Parmi ces objets, considérés comme exceptionnels, deux figures de reliquaire Kota du Gabon (estimation 120.000 euros pièce), un avant d'arche rituelle Dogon (80.000 euros), une figure de reliquaire Byéri Fang (800.000 euros), un rare poteau funéraire Waaga des Konso d'Ethiopie, un roi Tshokwe d'Angola (vedette de la vente, 1.500.000 euros), un ancêtre Urhobo du Nigeria (80.000 euros), un ornement de tambour Ikoro du Nigeria (300.000 euros) ou une statue Hemba de la RDC (700.000 euros). 

Egalement hors norme quelques statues longilignes Mumuye dont il a été un des premiers découvreurs (de 25.000 à 150.000 euros) tout comme les sculptures Botichio Fon du Bénin (de 2.000 à 6.000 euros). Parmi les lots les moins chers (800 à 3.000 euros), on peut citer une statuette Bamikele du Cameroun, une tête Boki du Nigeria, des jumeaux Ibedji Yorouba du Nigeria, un bras du Vodu du Bénin, une tête Sao du Tchad ou un couteau de circoncision Dogon du Mali. La plupart des autres lots, tous de qualité, sont estimées entre 5.000 et 20.000 euros et pourraient être adjugées davantage.

Outre ces pièces africaines (peu de masques, beaucoup de statues), on trouve des objets précolombiens dont une tête de mort Maya (50.000 euros) et océaniens dont un coffre Batak de Sumatra (20.000 euros).

La veille, PBA met à l'encan différents objets ayant appartenu à Jacques Kerchache, notamment une toile de Paul Rebeyrolle (50.000 euros), un fusain de Sam Szafran (60.000 euros), une armure japonaise du XVIIème siècle (100.000 euros) et nombre de boîtes d'insectes (de 150 à 500 euros) ainsi que des gravures morbides et des miniatures indiennes (de 1.000 à 8.000 euros).

A noter le 16 juin, toujours à Paris, ce qui confirme sa place de capitale mondiale de l'art primitif, une belle vacation organisée par Sotheby's: on y trouve, notamment un singe porteur de coupe Baoulé, Côte d'Ivoire (estimation 180.000 euros), une grande statue Sénoufo de Côte d'Ivoire (100.000 euros), une tête à trois visages Kuyu de la RDC (300.000 euros), un masque Fang du Gabon (130.000 euros) et, pour les arts du Pacifique, une figure de proue Maori (120.000 euros) une statue Kanak de Nouvelle Calédonie (120.000 euros) ou une statue du Bas Sepik de Papouasie (350.000 euros).

Enfin la veille, le 15 juin, Christie's France met aux enchères dans un ensemble assez inégal quelques rares pièces africaines, dont une tête perlée Bamikelé du Cameroun (60.000 euros), un cavalier Baoulé de Côte d'Ivoire) (450.000 euros) ou un fétiche Yombé du Congo (600.000 euros).

A noter que le 14 juin, la SVV Binoche-Renaud-Giquello organise à Drouot la vente de 25 lots mexicains anciens. de la collection Kerchache, dont un personnage Olmèque,1000 avant JC, en pierre dure (27.000 euros) ou une statuette Teotihuacan 250 après JC en serpentine vert sombre (22.000 euros).

13 juin, 16 h, Drouot Montaigne, renseignements : www.pba-auctions.com (le 12 juin, même lieu, a lieu la vacation consacrée aux peintures, collections d'insectes et objets de curiosité ayant appartenu à Jacques Kerchache).
14 juin, 14h30, Drouot Richelieu, renseignements : www.binoche-renaud-giquello.com
15 juin,14h30, 9 avenue Matignon, Paris 8, renseignements : www.christies.com
16 juin, 14h30, 76 rue du Faubourg Saint Honoré, Paris, renseignements : www.sothebys.com

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