L'édito de La Tribune : Libérez La Poste

Par latribune.fr  |   |  374  mots
Par Pierre-Angel Gay, directeur adjoint de la rédaction.

Ne rien céder sur le fond, mais sans déclencher une nouvelle guerre de religion. Nicolas Sarkozy s'est livré à cet exercice d'équilibre, hier, sur La Poste. Celle-ci abandonnera bien son statut d'établissement public pour adopter celui de société anonyme (voilà pour la réforme). Mais elle ne s'ouvrira qu'à des capitaux publics (voilà pour la main tendue à des défenseurs du service public très remontées). Un discours qu'il devrait réitérer aujourd'hui, en recevant partis politiques, organisations syndicales et associations de consommateurs à l'Elysée. Il n'est pas sûr que cela suffise à les rassurer. Et comment ne pas le comprendre, le passé enseigne qu'un changement de statut n'est qu'un préalable à des évolutions plus radicales.

Mais contrairement à la réforme de la TV publique, qu'aucune explication sensée n'est jamais venue justifiée, et à la querelle surréaliste sur le travail dominical, dont l'âpreté n'a d'égale que la minceur de l'enjeu, la réforme de La Poste est un impératif. On peut le regretter, mais le temps des diligences et des relais de poste ne reviendra pas.

Comme France Télécom, EDF et GDF avant elle, La Poste ne peut se permettre de rester à l'écart des grandes évolutions de l'économie européenne. Elle a besoin d'un statut qui lui permette de se financer _ sans être contrainte de tendre sa sébile à un Etat perpétuellement désargenté _ et de se mouvoir hors des frontières hexagonales. Le rôle de l'Etat n'est pas de construire un groupe dans le colis, ni de bâtir un compétiteur dans le courrier express aux DHL et autres UPS (qui marchent d'ailleurs très bien).

France Télécom, EDF et GDF, loin d'être les épouvantails agités par la gauche et les syndicats, sont là pour nous rappeler qu'un groupe privé peut à la fois assurer des missions de service public et s'imposer dans la compétition internationale. Que serait France Télécom sans la réussite d'Orange? Quel serait l'avenir d'EDF sans les acquisitions de British Energy, en Grande-Bretagne, ou de Constellation aux Etats-Unis? Le réduit gaulois n'est pas une politique. La Poste doit s'adapter. Faute de quoi, elle mourra.