Notre vieil ennemi le chômage

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Par Sophie Gherardi, directrice adjointe de La Tribune.

Le chiffre des demandeurs d'emploi inscrits en janvier 2009 donne le vertige : 90.200 en un seul mois. On se prend à faire des multiplications : si c'est pareil chaque mois de l'année, cela fera 1 million de plus. Des divisions : chaque jour, cela fait 3.000 chômeurs supplémentaires. Des additions : en trois mois, le nombre des demandeurs d'emploi a augmenté de 150.000. La soustraction, elle, se lit dans le moral des Français qui dégringole.
Que le chômage augmente n'est pas une surprise, qu'il augmente aussi brutalement en est une. La France est encore loin, il est vrai, de la vague tueuse qui a balayé l'Espagne en janvier, 200.000 personnes de plus au chômage dans un pays de 45 millions d'habitants. Mais l'Espagne, elle, avait connu une décrue de plus de 10 points de son taux de chômage sur la dernière décennie.
Le chômage français avait aussi baissé entre 2005 et 2008 mais, au point de retournement de l'été dernier, avant qu'il se remette à croître, il représentait encore 7,2 % de la population active. Ce moment, on le sait maintenant, était le meilleur du cycle économique. Au Royaume-Uni, le meilleur du cycle s'est situé en 2005, et le chômage y était alors de 4,7 %. Après une violente dégradation, il n'a atteint en janvier 2009 « que » 6,3 %, selon les statistiques harmonisées de l'Organisation internationale du travail.
Cette comparaison avec nos voisins a ceci de déprimant que la France n'a connu ni une longue période de décrue du chômage, comme l'Espagne, ni le plein emploi, comme le Royaume-Uni. Objectivement, les perspectives de reprise économique sont plus sombres chez eux, dans la mesure où les secteurs porteurs qu'étaient l'immobilier pour l'Espagne et la finance pour le Royaume-Uni sont touchés au c?ur et ont peu de chances d'en sortir aussi vigoureux qu'avant. Ces deux pays vont devoir changer de modèle de croissance. En France, c'est différent : nous retrouvons un vieil ennemi, toujours le même, que nous n'avons jamais su vaincre.