Arrêtons de tirer sur l'autoentrepreneur

Par François Hurel, président de l'Union des autoentrepreneurs  |   |  753  mots
Par François Hurel (*), président de l'Union des autoentrepreneurs.

Le nouveau régime de l'autoentrepreneur est plébiscité par les Français : plus de 125.000 d'entre eux se sont déclarés en moins de trois mois, largement plus que ne le laissaient imaginer les simulations les plus optimistes. Ce succès constitue une des rares bonnes nouvelles du moment et il y a lieu de s'en réjouir, car une véritable révolution se déroule sous nos yeux, prémices d'une sortie de crise et, pourquoi pas, premier signal d'une nouvelle relance.

C'est d'abord une révolution technique : chacun peut maintenant se lancer dans une activité professionnelle indépendante en limitant les formalités administratives au minimum et le faire sur Internet en quelques clics. Qui aurait imaginé, il y a quelques mois seulement, que tous les obstacles à ce type de démarche pouvaient être surmontés en quelques semaines par des administrations, parfois fustigées pour leur lourdeur et leur peu de respect de l'initiative ? Désormais leurs réponses sont claires et leurs capacités d'adaptation montrées en exemple.

C'est aussi une révolution administrative : le prélèvement libératoire qui s'applique à l'autoentrepreneur est tout à la fois modéré, lisible et incroyablement simple : un pourcentage sur le chiffre d'affaires. A ce sujet aussi, qui aurait pu concevoir, il y a quelques mois, une chaîne de décision au sein de laquelle interviennent de nombreux acteurs aux expertises, aux contraintes et aux motivations différentes, à ce point promoteurs d'un dispositif aussi fluide ? Mieux encore, qui aurait pu croire à la mise en place - enfin ! - d'un système à risque zéro où, lorsqu'il n'y a pas de chiffre d'affaires, donc pas de revenu, il n'y a rien à payer ?

C'est également et presque surtout une révolution culturelle : l'autoentrepreneur est l'incarnation d'un modèle où chacun s'assume comme stratège et acteur de sa vie professionnelle. Là encore, qui aurait osé espérer, il y a quelques mois, que les Français, dénoncés par certains comme les champions du monde de l'assistance et du recours à l'État, puissent démontrer une telle appétence pour l'initiative individuelle et la prise de responsabilités ? Depuis longtemps, les sondages montraient que les Français voulaient être professionnellement libres. Ils le démontrent à la première occasion, alors ne boudons pas cette bonne nouvelle.

Révolution aussi car la crise peut être une formidable source d'opportunités. Nonobstant les difficultés actuelles paralysant les comportements de nombre de nos concitoyens, l'autoentrepreneur va contribuer à résoudre nombre de questions sans réponses pleinement satisfaisantes : la perte totale ou partielle d'emploi, l'amélioration du pouvoir d'achat, l'insertion économique - et donc, sociale - des non-diplômés et des populations fragiles ou encore le travail au noir?

J'entends ici et là les inquiétudes, et la litanie des effets pervers de cette liberté ou des effets d'aubaine de ce régime, et toutes les plus mauvaises raisons pour brimer les bonnes volontés. Je souhaite rassurer sur ce point - et le ministre Hervé Novelli l'a martelé également -, il n'a jamais été question de remettre en cause les qualifications professionnelles indispensables à l'exercice de certaines activités artisanales ou libérales? Personne ne le comprendrait. Il en va de la sécurité du consommateur et il n'y a donc pas de débat.

En créant une Union des autoentrepreneurs accessible gratuitement à tous, nous avons souhaité mettre l'accent sur la professionnalisation de ces nouveaux entrepreneurs et permettre aux consommateurs de répondre de manière satisfaisante à ses attentes. Il pourra faire savoir son opinion. La charte que doivent signer les adhérents est en ce sens un garde-fou déjà établi.

Certes, le modèle ne peut pas être parfait du premier coup, et l'Union des autoentrepreneurs sera présente pour faire entendre la voix de nouvelles propositions. Cependant, je reste attaché avant toute chose à la présomption d'innocence, et rappelons que ce dispositif est souvent complémentaire à un autre régime ou à une activité normale ou transitoire vers la création d'une entreprise. Sur ce point, ne dit-on pas que c'est le premier pas qui compte ? Jamais aucun statut n'avait ouvert de telles perspectives. La mission de l'Union des autoentrepreneurs sera de veiller à compléter les manques et à éduquer aux règles de notre société ce très beau bébé.

 

(*) Auteur du rapport en faveur d'une meilleure reconnaissance du travail indépendant qui a proposé ce nouveau régime à Hervé Novelli, secrétaire d'état aux PME.