Dollar glissant

Par mmotte@latribune.fr  |   |  327  mots
Par Muriel Motte, rédactrice en chef à La Tribune.

Le grand balancier monétaire s'est remis en branle. En deux mois le dollar a perdu 10% de sa valeur face à un panier de grandes monnaies. Il fallait débourser 1,25 dollar pour obtenir 1 euro début mars, il en faut 1,40 aujourd'hui et il en faudra probablement 1,45 sous peu annoncent les stratèges de banque. Comme toujours, on peut voir le verre à moitié plein. Le dollar recule parce que le pire de la crise économique et financière est passé. Depuis quelques semaines, les marchés d'actions et de matières premières sont portés par ce fol espoir, étayé par quelques statistiques.

En Europe, l'indice qui synthétise l'activité dans l'industrie et les services est à son plus haut niveau depuis huit mois. Aux Etats-Unis, le moral du consommateur s'améliore, et la Chine voit les premiers fruits de son plan de relance à 460 milliards d'euros. L'hiver économique fait place à un timide printemps. Exit le dollar comme couverture en période de grands froids. Le billet vert fait les frais du réveil de l'appétit pour le risque.

Mais on peut aussi voir le verre à moitié vide. Le roi dollar vacille car si la crise semble jugulée, il faut maintenant en payer l'addition. L'Amérique a besoin d'argent, de beaucoup d'argent - plus de 3.000 milliards cette année selon la banque Goldman Sachs - pour combler son déficit budgétaire et financer son plan de soutien aux banques. On craint la mauvaise humeur de la Chine, premier créancier étranger qui promet d'être plus regardant à l'avenir, et le couperet des agences de notation qui pourraient confisquer aux Etats-Unis leur "AAA", synonyme de bas coûts de financement. Enfin, les marchés redoutent que la politique activiste menée par la banque centrale américaine pour éviter la déflation ne dégénère en? anticipations d'inflation. Le débat agite les membres de la Fed elle-même. L'été s'annonce chaud sur les monnaies.