La prison dorée de l'iPhone

Par jbjacquin@latribune.fr  |   |  431  mots
Par Jean-Baptiste Jacquin, rédacteur en chef à La Tribune.

Apple a encore frappé. Le groupe qui avait zéro expérience dans la téléphonie mobile il y a moins de deux ans est aujourd'hui incontournable. Et même central, tant les stratégies commerciales se définissent désormais par rapport à l'iPhone et à son "App Store", cette plate-forme de services plus ou moins utiles. 

Pourtant les chiffres ne devraient guère laisser de doute sur la hiérarchie des acteurs. Apple a vendu 21 millions d'iPhone dans le monde depuis son lancement en juillet 2007. C'est le nombre de mobiles que Nokia vendait tous les quinze jours l'an dernier.

Mais l'américain à la pomme a fait bouger le marché et tire à lui les seuls segments qui échappent à la récession de 2009. Apple refait le coup de l'iPod et de iTunes. C'est le fabricant du Mac qui a révolutionné l'économie de la musique en ligne, la où les industriels experts, les majors du disque, avaient tous lamentablement échoué.

Cela fait quatre ans que les opérateurs télécoms et les fabricants de téléphones claironnent l'avènement de l'Internet mobile, mais c'est Apple qui le rend accessible aux moins technophiles d'entre nous. Le revers de cette médaille, pour le consommateur, est qu'Apple aime bien sécuriser ses revenus futurs et enfermer ses clients dans un périmètre dont il garde le contrôle.

Combien de clients de baladeurs iPod ont découvert, mais un peu tard, que le système "propriétaire" du fabricant et les verrous numériques sur les titres interdisaient d'écouter de la musique achetée sur d'autres magasins en ligne qu'iTunes ? Aujourd'hui Apple réussit la prouesse de s'immiscer entre les opérateurs télécoms et leurs clients. Du jamais-vu.

En effet, un client d'Orange qui achète auprès de l'opérateur français un iPhone, avec un forfait Orange, doit néanmoins s'identifier sur le service iTunes, en y donnant ses coordonnées bancaires. Mais le "buzz" autour de l'iPhone est tel que les nouveaux convertis ne rechignent pas à se lier aussi étroitement avec Apple.

Sans doute auront-ils demain le sentiment d'être retenus prisonniers du système. Mais cette "prison" dans laquelle ils entrent de plein gré pourrait aussi leur ouvrir les yeux sur la cellule qu'ils abandonnent. Car les opérateurs étaient parvenus à maintenir la relation client dans un huis clos bien plus hermétique que ne l'est la plate-forme "App Store". Chaque opérateur proposait sa plate-forme avec ses prestataires assermentés. La prison de l'iPhone est finalement bien plus ouverte sur l'extérieur.