Taxe carbone, petite vertu

Par Valérie Brunschwig-Segond, journaliste à La Tribune.

Que le gouvernement profite de la montée de sève écologique des Français pour relancer l'idée de la taxe carbone révèle au moins un bon sens du calendrier politique. Après avoir témoigné d'un réel enthousiasme pour les Verts qui les représenteront au parlement européen, les Français devraient se montrer bienveillants à l'égard d'une contribution dont la finalité officielle est de rendre l'animal énergivore plus responsable en lui faisant payer ses dommages à l'environnement. D'autant que, en théorie, la fiscalité écologique est proprement vertueuse : en modifiant les comportements polluants, elle finit en principe par disparaître.

En un mot, si elle marche, elle est biodégradable. Seulement voilà. Elle ne provoque des changements de comportement que si elle est très élevée, toute taxe a minima incitant les agents à s'en acquitter en toute bonne conscience plutôt qu'à se lancer dans l'innovation verte. Or, comment imaginer que les cinq parties prenantes invitées à la conférence des experts voulue par le gouvernement parviendront à un consensus tant sur la valeur des dommages causés à l'environnement que sur le niveau efficace de taxation ?

Et si l'accord entre les parties se révélait impossible, qui peut croire que le gouvernement sera prêt, politiquement, à assumer une contribution suffisamment visible pour porter ? Mais ce n'est pas tout. Car pour être efficace, la taxe carbone doit être différenciée par consommateur, récompenser les plus vertueux en faisant payer les pollueurs. On sait déjà que toute taxation moyenne par secteur d'activité désincitera les Verts par vocation. Or, la vérité est que connaître le bilan carbone réel de chaque produit relève d'un travail de titan impossible à mener de façon fiable. En clair, on n'a pas les moyens, ni politiques ni humains, de mettre en place une fiscalité écologique efficace.

C'est pour cela que la régulation de la pollution par le marché des droits à polluer, qui existe en Europe depuis 2005 pour les industries les plus gourmandes en énergie, est jugée plus efficace que la taxe carbone. Pourquoi alors s'accrocher à cette contribution verte ? Parce que l'objectif du gouvernement n'est pas tant de lutter contre la pollution que de trouver des recettes fiscales pérennes pour compenser, pour les collectivités locales, la suppression de la taxe professionnelle sur les investissements promise par Nicolas Sarkozy. Seulement, même pour cela, une taxe a minima n'y suffira pas. N'est pas vert et bleu qui veut !

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