Cyberpirates : la liberté contre l'égalité

Par jbjacquin@latribune.fr  |   |  350  mots
Par Jean-Baptiste Jacquin, rédacteur en chef à La Tribune.

Mea culpa. Il y a deux mois, nous nous demandions ici, incrédules, si Internet méritait vraiment d'être hissé au rang de droit de l'homme ? Le Conseil constitutionnel a apporté hier une réponse cinglante à cette question. C'est en invoquant la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et son article 11 sur la liberté de communication et d'expression, que les sages ont expliqué que la coupure de l'accès Internet ne pouvait être décidée que par un juge.

Un camouflet d'une rare violence pour le gouvernement puisque c'est la disposition phare du projet de loi défendu par Christine Albanel, avec le soutien appuyé de Nicolas Sarkozy, qui se trouve censurée. Le débat parlementaire sur le texte relatif au téléchargement illégal avait déjà été un chemin de croix pour la majorité, l'UMP étant divisée. Tout comme le PS dont les députés et les sénateurs avaient voté en sens contraire.

La cacophonie sur ce sujet de société va reprendre de plus belle. Et gageons que de nombreux opposants à la loi dite "Hadopi" vont crier victoire? à tort. Ne nous trompons pas de débat. Le Conseil constitutionnel ne vient pas nous dire que le piratage est une infraction moins grave qu'on ne le disait ou qui mériterait des sanctions moins lourdes. Ce n'est pas son sujet. Mais il nous pose un sérieux problème à l'heure d'Internet.

Comment un Etat de droit peut-il réprimer une infraction qui, collectivement, coûte cher, mais individuellement ne représente souvent que des sommes faibles ? L'idée de rendre tous les cyberpirates égaux devant la loi est illusoire car il faudrait des moyens considérables pour surveiller la Toile tout en s'entourant des garanties nécessaires au respect des libertés individuelles. Il va donc falloir revenir à des procédés plus classiques et aléatoires. C'est le bon vieux gendarme qui reprend du service le long de la route, en lieu et place des radars automatiques. Et tant pis pour celui qui se fait pincer.