La double peine de l'Ecureuil

Par pagay@latribune.fr  |   |  425  mots
Par Pierre-Angel Gay, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune.

C'est une double peine. Les 20 millions d'euros d'amende et le blâme, infligés mercredi 15 juillet à la Caisse nationale des Caisses d'épargne (CNCE) par la Commission bancaire, pèsent plus par les "considérants" de la sanction que par son montant. Ou même, par son symbole. Chargée de veiller à la stabilité et à la bonne santé des banques, la Commission n'a pas de mots assez durs pour dénoncer les activités de marché risquées de l'Ecureuil, et leur complexité, sans que celui-ci ait mis les "outils et l'environnement de contrôle adéquats".

Elle solde là, par KO, les relations tumultueuses qu'elle entretenait avec l'ex-patron de l'Ecureuil, Charles Milhaud. Un différend qui venait de loin, datant de 2006 au moins, et qui portait sur la mue accélérée des vieilles Caisses d'épargne en un groupe bancaire universel, couvrant l'ensemble des métiers de la finance. La Commission bancaire multipliait les rappels au règlement quand le président du directoire de la CNCE n'y voyait que harcèlement. La première exigeait une gestion préventive des risques, quand le second voulait prouver le mouvement en marchant.

Né en 1943, Charles Milhaud était obsédé par le temps nécessaire pour parachever sa grande ?uvre, que le rapprochement avec les Banques Populaires devait venir couronner. En réalité, le président Milhaud avait fini par se rendre aux arguments de la Commission bancaire, en décidant début 2008 l'extinction progressive des activités pour compte propre de la banque, les plus dangereuses. Une extinction trop tardive et mal gérée, qui a valu à l'Ecureuil une perte de "trading" de 751 millions d'euros. Et à Charles Milhaud, un putsch et son éviction le 19 octobre dernier. C'était pour lui, sans aucun doute, la sanction la plus lourde.

Mais l'amende et le blâme ne sont pas inutiles pour autant. Car, d'une certaine façon, ils soulignent l'une des faiblesses dont ont trop longtemps souffert les Caisses d'épargne : l'absence de tout contre-pouvoir. Si le conseil de surveillance avait joué son rôle de corde de rappel, avait tempéré le désir d'aller toujours plus vite de Charles Milhaud et l'avait contraint, plus tôt, à se soumettre aux injonctions de la Commission bancaire, peut-être la banque se serait-elle évitée une perte et l'ex-président du directoire aurait-il sauvé son siège.

Plus que des erreurs de son charismatique ancien patron, par certains côtés visionnaire, les Caisses d'épargne ont souffert de leur mauvaise gouvernance. A bon entendeur...