On savait la finance amnésique. Un an à peine après cet "octobre noir" qui avait failli emporter l'économie mondiale, il avait fallu se faire à l'idée. Les bonus, dans les banques, étaient de retour.
Jusqu'à l'indécence à New York, où le "Wall Street Journal" évaluait il y a une quinzaine de jours à 140 milliards de dollars, un record, le montant total des rémunérations que les 23 plus grandes banques américaines devraient verser à leurs collaborateurs au titre de 2009. Plus modestement à Londres, où 80% des financiers, tout de même, estiment que leur bonus sera au moins égal ou supérieur à leur salaire fixe.
Puis, par le biais d'une étude de la Réserve fédérale de San Francisco, on avait découvert que les prêts subprimes, ces prêts immobiliers accordés à des ménages incapables de les rembourser, à l'origine directe de l'explosion de la bulle financière, avaient déjà retrouvé, en proportion, leur niveau d'avant la crise.
Et hier, le coup de grâce est venu d'IBM. L'entreprise d'Armonk, dans l'État de New York, a annoncé un nouveau programme de rachats d'actions, à hauteur de 5 milliards de dollars. Cinq milliards qui viennent s'ajouter aux 4,2 milliards d'un plan précédent, non encore utilisés. IBM, qui s'apprête donc à redistribuer 9,2 milliards à ses actionnaires, est ainsi la première entreprise de "l'économie réelle" à renouer avec une pratique très en vogue avant la crise.
Ses actionnaires s'en réjouiront, l'opération ayant pour but de faire monter le cours du titre. Les professionnels s'en étonneront, les résultats en hausse d'IBM masquant difficilement une décrue de son chiffre d'affaires. Détruire du capital, pour une entreprise, est un aveu d'échec. Cela signifie qu'elle n'a pas de perspectives de croissance.
Bonus, subprimes, obsession du cours de Bourse, la trilogie du "monde d'avant" est de retour.
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