Pour que l'Europe se réveille  !

L'Union européenne demeure la première économie du monde. Alors que l'Espagne prend la présidence de l'UE pour six mois, les défis sont nombreux au sortir de la crise, pour retrouver une croissance d'au moins 3%, faire face au vieillissement et à la concurrence des pays émergents. Les priorités sont de gagner la compétition du savoir, d'organiser l'Europe de l'énergie et de développer une vraie stratégie internationale.

La léthargie institutionnelle qui avait saisi l'Europe après les non français et néerlandais de 2005 est achevée. L'Union possède un cadre et des institutions renouvelés : voici le moment de sortir du "business as usual" bruxellois pour affirmer une ambition nouvelle. Le marché unique, l'euro, l'élargissement sont des succes story. L'Union européenne ne représente que 7,3% de la population du globe mais elle demeure encore grâce à ses entreprises, la première économie du monde.

L'ambition pour l'Europe s'énonce simplement : atteindre au moins 3% de croissance par an : deux fois ce que prévoit l'eurogroupe pour 2010-2020. Cette croissance dépend de la compétitivité des entreprises sur le site européen et l'attractivité de ce territoire. Elle seule permettra de répondre aux interrogations des Européens sur :
- les mutations liées au changement climatique et aux contraintes que l'Europe s'est elle-même imposées et l'évolution du coût des matières ?premières ;
- le vieillissement de nos populations qui modifiera nos façons de travailler, de consommer, d'assurer les solidarités mais aussi d'aborder le sujet de l'immigration ;
- la montée des pays émergents, déjà présents sur les marchés et nouveaux acteurs de la gouvernance mondiale.

Atteindre 3% au moins de croissance annuelle est un défi réaliste, à condition d'avoir une méthode et des priorités. La méthode, les rapports de force en Europe l'imposent. D'un côté, l'Union avec un budget de 130 milliards d'euros par an et sans capacité d'emprunt. De l'autre, des Etats, détenteurs des leviers budgétaires et politiques : fiscalité, social, éducation, recherche. José Manuel Barroso pour l'exécutif européen et Herman Van Rompuy avec les Etats devront construire ce dialogue économique sur les finances publiques, la monnaie, la cohérence des engagements européens et des choix nationaux.

Pour réussir la sortie de crise, nous devons nous réformer - le pacte de stabilité et de croissance nous y contraint, non par sourcilleuse orthodoxie mais parce que seuls des changements structurels permettront de créer de nouvelles sources de croissance - et le faire de façon concertée, en sortant notre gouvernance économique de son triangle des Bermudes.

Les priorités, nous les avions actées dès avant la présidence française puis en début d'année à nouveau (*). D'abord, créer un espace des compétences. La première compétition est celle du savoir. Or, nos chercheurs migrent vers l'Amérique et l'Asie ! Recherche, développement et innovation sont les talents additionnés des étudiants, chercheurs, professeurs, centres de recherche, entreprises. Dans bien des secteurs innovants, l'Europe peut mieux faire que ses concurrents : infrastructures intelligentes, économie numérique, nanotechnologies. La libre circulation des compétences peut s'organiser dès maintenant autour de pôles d'excellence européens. Et l'Europe doit se montrer enfin capable de protéger efficacement ses inventeurs en créant enfin un brevet communautaire débarrassé des nationalismes linguistiques.

Ensuite, organiser l'Europe de l'énergie et de la lutte contre le changement climatique. L'Union n'a pas vocation à s'ingérer dans les choix énergétiques des nations, même si ses engagements climatiques affecter le mix de chacun. Mais plutôt que de laisser vingt-sept diplomaties dialoguer séparément avec Moscou, Téhéran ou Riyad, n'est-il pas temps de coordonner nos intérêts face aux grands fournisseurs ? Et puis, il faudra bien traiter collectivement la question des investissements : partout des chantiers de modernisation et ?d'interconnexion des réseaux sont à engager, l'Europe devra renouveler la moitié de son parc nucléaire d'ici à 2030. Il s'agit là d'un vrai programme pour la relance européenne.

Sur la politique climatique, nos industries de réseaux et nos énergéticiens, leaders mondiaux, nos technologies vertes nous donnent un réel avantage compétitif. Mais l'Europe ne doit pas servir de variable d'ajustement au reste du monde qui contemplerait nos efforts de réduction de gaz à effet de serre en s'exonérant des contraintes que nos entreprises se sont vu imposer.

Enfin, développer une stratégie internationale. L'Europe ne pèsera dans la gouvernance mondiale que solidaire : au FMI, à l'OMC, à l'OMS, à l'OIT, dans le post-Copenhague. L'Europe doit aussi redécouvrir son Sud. L'Union pour la Méditerranée représente une initiative utile. L'Afrique, la Turquie, le Proche-Orient proposent des espaces naturels où nos entreprises peuvent trouver les ressources, les débouchés et les partenariats que nos concurrents internationaux et en particulier chinois ont commencé à investir.

La mondialisation est un accélérateur qui met en compétition des "économies continents". La nouvelle Europe ne peut plus se disperser et laisser du temps au temps. La crise a convaincu nos concitoyens que nous avions besoin d'Europe pour assurer le développement de nos entreprises et de notre compétitivité, c'est-à-dire notre prospérité et nos valeurs.
 

(*) "Le réveil de l'Europe", Jérôme Bédier, Editions Eyrolles, mars 2009.

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