Dette de glace

Par pmabille@latribune.fr  |   |  362  mots
Par Philippe Mabille, rédacteur en chef-éditorialiste à La Tribune.

Pour la seconde fois en moins de deux ans, l'Islande, littéralement la "terre de glace", ce tout petit pays perdu près du Groenland, fait figure de laboratoire de la crise financière. L'île a frôlé la faillite en septembre 2008 parce que les banques de Reykjavik se sont prises, au plus fort de la bulle, pour des "hedge funds". Les trois principales banques du pays ont été nationalisées et le FMI a dû intervenir pour éviter la banqueroute aux 320.000 habitants, contraints de revenir à leurs bateaux de pêche?

Cette crise vient de connaître une réplique avec la décision mardi soir du président Olafur Ragnar Grimsson de soumettre à référendum le remboursement de 3,8 milliards d'euros avancés par le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Une somme destinée à indemniser les clients britanniques et néerlandais lésés par la faillite de la banque Icesave, aussi nombreux que les habitants de l'Islande !

La signature islandaise fait plus que jamais figure de "junk bond", ce qui risque de précipiter de nouveau le pays dans une crise financière. L'Islande apparaît de fait de plus en plus isolée ; la commission de Bruxelles a prévenu que l'incertitude politique engendrée par l'affaire Icesave pourrait porter un coup fatal aux ambitions européennes de l'île. Certes, une faillite islandaise ne serait pas un choc macroéconomique énorme pour le monde. Mais il s'agit d'un test pour la communauté financière internationale, au moment où chacun, et pas seulement les agences de notation, s'interroge sur le risque représenté par la dette souveraine des Etats, même des plus grands comme les Etats-Unis.

Voir un peuple se rebeller ainsi contre l'injustice qui lui est faite de par l'impéritie et l'incompétence de son élite financière est un signe que sous la crise, la colère populaire gronde encore. On dit souvent qu'il n'y a que trois moyens pour un Etat de se débarrasser d'une dette trop lourde : l'inflation, la banqueroute ou la guerre. De ce point de vue, le cas islandais ne peut que nous faire frissonner, en ce temps de glace.