Lang n'est pas numérisable

Par jbjacquin@latribune.fr  |   |  317  mots
Par Jean-Baptiste Jacquin, rédacteur en chef à La Tribune.

La loi Lang sur le livre est un édifice dont la France peut être fière. Mais les plus beaux équilibres architecturaux ne sont pas adaptés à tous les usages. C'est un peu un pavé dans la mare que l'Autorité la concurrence a jeté mardi dans le consensus qui se dessinait sur l'idée de transposer au livre numérique le principe du prix unique. Cette loi Lang, votée à l'unanimité par les députés en 1981, a d'ailleurs été confortée l'an dernier par le rapport commandé par le gouvernement à Hervé Gaymard.

Le député de Savoie, pourtant libéral, a conclu que cette règle permettant de trouver un livre au même prix dans une grande surface ou une maison de la presse n'avait en rien entravé la concurrence. Au contraire, la France se targue aujourd'hui d'avoir le réseau de libraires le plus dense et une offre éditoriale pléthorique. Pourquoi alors ne pas réitérer le même dispositif pour le livre numérique?? Parce que ce marché n'existe pas encore.

La régulation du marché est souvent un moyen de développer la diversité de l'offre dans des conditions d'accès améliorées pour les consommateurs. Ceci est encore plus vrai pour les produits culturels, où la notion de diversité dépasse les lois du marché. Mais encore faut-il qu'il y ait un marché. N'en déplaise aux Cassandre qui, n'en doutons pas, vont donner de la voix dans les prochains jours, il serait présomptueux de dire aujourd'hui quel modèle économique pour le livre risque d'étouffer l'autre, quelle innovation bousculera la hiérarchie des acteurs, de quels prédateurs il faut se protéger.

Il y a dix ans, Apple était moribond et Google n'avait pas de modèle économique. Le fourmillement actuel de projets autour du livre numérique prouve que rien n'est encore joué.