Les dominos de l'effet ouzo

Par Philippe Mabille, éditorialiste à La Tribune.

Le drame grec ressemble par son mécanisme à l'engrenage infernal qui a mis à terre le système monétaire européen au début des années 1990. Les attaques spéculatives, à l'époque contre les monnaies, aujourd'hui sur les dettes obligataires, visent à rendre insoutenable la situation financière des pays considérés comme des maillons faibles.

En portant les taux grecs à près du double des taux allemands, les marchés ont artificiellement créé les conditions d'une faillite d'Athènes. Etranglée, la Grèce n'aurait plus d'autre choix que soit sortir de la zone euro, avec un risque de ruine et de chaos social, soit être placée sous la tutelle de l'Europe ou, plus humiliant encore, du FMI. En affirmant hier, à la veille de l'examen du plan de rétablissement des finances publiques de son pays, que la Grèce est "un problème de la zone euro", le ministre des Finances, Giorgos Papakonstantinou, a donc pointé du doigt le risque d'effet dominos des attaques spéculatives dont son pays est victime.

Avec pour argument que si la Grèce tombe, les marchés resserreront ensuite leur étau sur l'Espagne et le Portugal. Derrière ces attaques, c'est donc bien, comme lors de la crise du SME, l'Europe qui est mise à l'épreuve. A l'époque, l'Allemagne avait refusé de payer pour la livre sterling, mais elle avait sauvé le franc à l'été 1993, en adressant un signal politique très ferme aux marchés.

Quels que soient les torts de la Grèce, qui a trop longtemps dansé au son du sirtaki grâce au bouclier de l'euro, l'Europe fait face aujourd'hui au même défi. Athènes ne tiendra jamais ses objectifs de redressement si, dans le même temps, un coup d'arrêt n'est pas donné à la spéculation pour faire baisser les taux d'intérêt. Après tout, les gouvernements ont bien aidé les banques pour éviter un risque systémique. Pourquoi ne pas envisager un mécanisme d'aide aux Etats surendettés, par le biais d'un emprunt affirmant la solidarité financière de la zone euro ? C'est ce que préconise le Prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz. Faute de quoi, la gueule de bois de l'effet ouzo pourrait bien atteindre d'autres alcooliques de la dette, dont la France fait partie.

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