Finances : retour vers le futur

Par Harold James  |   |  702  mots
Par Harold James
, professeur d'histoire et d'affaires 
internationales à l'université de Princeton.

L'ancien patron de la Réserve fédérale, Paul Volcker, a largement inspiré la proposition du président Obama pour restructurer le secteur bancaire. Sans nul doute le plus brillant directeur de banque centrale du XXème siècle, ?Volcker s'est exprimé très tôt et de manière répétée sur les problèmes de ce qu'il a appelé "le tout nouveau système financier". Mais Volcker a aussi fortement critiqué les dangers de la volatilité des monnaies. Quel est le lien entre la nostalgie d'un secteur bancaire simplifié et moins risqué et le désir de réintroduire un système monétaire qui semble aussi être une relique du passé ?

Avant même qu'Obama ne fasse son annonce le 21 janvier dernier, l'éventualité de raviver les réglementations bancaires en vigueur dans les années 1930 provoquait déjà de vifs débats. Les propositions pour ce que l'on appelle désormais la "règle Volcker" - qui interdirait les activités pour compte propre et inciterait les banques à ne pas "posséder, investir ou sponsoriser" des fonds spéculatifs ou des fonds de capital-investissement - sont une version réactualisée du Glass-Steagall Act, une loi votée aux Etats-Unis, en 1933, pour séparer les banques d'investissement et les banques commerciales.

Plusieurs pays avaient cette volonté de limiter les activités bancaires. En Belgique, où la première banque universelle fut établie au début du XIXème siècle, les banques d'investissement et les banques commerciales étaient aussi séparées. En Italie, les banques n'avaient pas le droit de posséder des parts dans des entreprises industrielles.

L'argument n'était pas tant sur le fait que les banques étaient "trop importantes pour faire faillite", mais plutôt d'apporter une réponse au fait que les banques avaient fourni des conseils tronqués à leurs clients. Les banques d'investissement avaient vendu des parts et des titres à leurs clients particuliers, se sont déchargées de leur propre risque, et se sont versé de substantiels honoraires au passage. Puis, tout comme aujourd'hui, beaucoup ont exigé un châtiment à l'encontre des banques et des banquiers. Mais ils voulaient aussi que les banques participent davantage au financement d'investissements nationaux et industriels. Les réformes bancaires ont, en effet, généralement infligé une punition aux banques, mais n'ont pas réussi à relancer de nouveaux crédits bancaires.

Le débat actuel est moins sur les dangers auxquels les banques exposent leurs clients que sur les risques qu'elles entraînent pour les contribuables. Les activités pour compte propre étaient justifiées, non pas pour les énormes profits que les banques en ont tiré, mais parce qu'elles étaient supposées créer des marchés et apporter des liquidités pour des instruments peu échangés. Les banques ont donc mis en place ce qui, dans les faits, est leurs propres marchés de substitution, permettant ainsi à leurs clients et à elles-mêmes de fixer un prix à des instruments qui n'auraient pas pu autrement être évalués. Les énormes profits étaient supposés être la récompense pour avoir fourni un service public.

De telles grandes banques sont utiles, car les acteurs plus petits ne peuvent pas à eux seuls constituer un marché. Les grandes banques sont aussi des acteurs importants sur les marchés monétaires internationaux, et accumulent des positions de change fortes à la fois entre leurs filiales et sur une base consolidée.

Si les banques modernes sont trop importantes et trop dangereuses parce qu'elles sont trop vulnérables, la façon la plus évidente de les rendre plus sûres est d'exiger d'elles des montants de fonds propres plus élevés. Mais, malheureusement, la manière la plus évidente pour les banques d'augmenter leurs ratios de capital est de restreindre leur crédit. En période de récession économique, c'est la dernière chose dont les entreprises ont besoin ou qu'elles désirent. La nouvelle réponse apportée à ce dilemme est de légiférer sur les activités qui doivent être totalement supprimées. L'espoir étant qu'en recentrant ainsi les activités financières, on encouragera d'autres types de crédits.

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