40% de femmes dans les conseils  : une loi ordinaire

Par Maryam Salehi, directeur général à la présidence, NRJ Group.

En cherchant à imposer 40% de femmes dans les conseils d'administration des sociétés cotées, la proposition de loi de Mme Marie-Jo Zimmermann n'a rien d'extravagant. En effet, l'article 1, deuxième alinéa, de la Constitution française, dispose que "la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales".

Il était donc inéluctable qu'un texte législatif vint favoriser l'accès des femmes aux mandats sociaux. Le mouvement impulsé par cette loi sera, en outre, irréversible ; enfin, et c'est l'essentiel, une telle loi sera juste. Car les femmes représentent la moitié de l'humanité, plus de 52% de l'électorat de notre République et près d'un actif sur deux en France, où elles ne constituent pourtant que 10% des conseils d'administration du CAC 40. Un constat alarmant, qui laisse à penser que les femmes, soit ne peuvent pas (ce qui serait grave), soit ne veulent pas (ce qui serait pire) accéder à de tels mandats sociaux.

La loi est donc nécessaire pour créer une force d'ascension. Si l'on a besoin de femmes pour siéger au sein des conseils d'administration, il faudra bien qu'on leur permette d'accéder d'abord aux fonctions de direction, c'est-à-dire que l'on se donne les moyens de leur assurer un déroulement de carrière similaire à celui des hommes. Faciliter la vie de la femme au travail sera donc non seulement un impératif social, mais aussi une obligation de gouvernance des entreprises.

 

Jusqu'à ce jour, le législateur a posé des règles d'égalité professionnelle de l'homme et de la femme, et fulminé des sanctions contre les récalcitrants. Les progrès sont tangibles, mais ne s'apprécient qu'au bout d'une génération, durée nécessaire pour que changent les mentalités ! La nécessité d'avoir recours à des femmes, et le partage du commandement qui s'ensuivra, permettront de bousculer conservatisme des esprits et archaïsme des habitudes. Cette loi juste sera donc une loi de progrès.

Un tel texte est également indispensable pour détruire un avatar de la pensée unique. En quoi est utile aujourd'hui la collégialité, dans les organes de direction des entreprises, si tous leurs membres, issus des mêmes écoles et membres des mêmes cercles, se détendent dans les mêmes clubs et réfléchissent selon le même modèle ? Hommes et femmes n'ont pas le même mode de vie et ne pensent pas de la même manière, car ils sont différents. Si l'objet de la collégialité est de profiter de la différence, pourquoi se priver de celle-ci ?

Dans une société commerciale d'une certaine taille, la collégialité des organes de direction est de rigueur : pourquoi, dès lors, ne pas l'organiser autour de la diversité et accueillir aussi bien les femmes que les hommes ? La conjonction de la pensée des unes avec celle des autres permettra d'élargir vues et perspectives de l'entreprise. Cette loi juste et de progrès sera une loi pour la diversité.

 

En créant des obligations de diversité, le législateur remplit son rôle fondamental. Il corrige ce qui n'est pas naturel, rétablit ce qui doit l'être. Or les femmes doivent être au sein de toutes les instances, puisqu'elles représentent un être humain sur deux. Puisqu'elles ne sont pas dans les instances dirigeantes, pour des raisons culturelles historiques ou économiques, le droit doit corriger cet état de fait.

Au fond, cette loi, qu'on nous dit exceptionnelle, sera ordinaire. Elle vaudra, d'ailleurs, pour tous : le jour où les hommes seront en minorité partout, ils pourront faire valoir à leur profit les principes qu'elle aura dégagés...

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