Mon programme pour le Medef : lettre ouverte à Laurence Parisot

Première femme à avoir pris la tête du patronat français en 2005, Laurence Parisot sera réélue demain présidente du Medef pour trois ans. Sophie de Menthon, présidente du mouvement Ethic, qui n'a pas pu présenter sa candidature, livre dans ce texte ses réflexions sur les enjeux de ce nouveau mandat pour les entreprises.

Ma chère Laurence, le 1er juillet au Medef, 561 personnes vont t'élire présidente... au nom de 2.200.000 entreprises. Peut-être à l'avenir pourrait-on envisager une représentativité plus substantielle ? Ce deuxième mandat de trois ans, une formalité sans opposants "autorisés", doit pourtant être différent car le bouleversement économique est quotidien. Le patronat doit être capable de se réinventer. Voici donc les quelques convictions qui m'ont poussée à croire qu'une autre candidature aurait eu un sens et qui pourront, je l'espère, t'inspirer.

Avant tout, il faut un Medef qui se dégage du politique et qui s'applique à prendre des résolutions d'autodiscipline : c'est au Medef de nommer ses médiateurs entre donneurs d'ordres et fournisseurs par exemple et non au gouvernement. Face à un Etat qui nous inquiète, quel que soit le talent du nouveau directeur général du Medef, fallait-il débaucher le directeur de cabinet en place du ministre des PME ? N'est-ce pas donner un signal fort de collusion entre l'entreprise (que nous ne voulons ni de droite, ni de gauche) avec le pouvoir en place ? Le Medef doit avoir un rôle de contre-pouvoir qui n'a que faire du mélange des genres. Il faut donc des vice-présidents à la forte stature supervisant les domaines stratégiques : économie, social, international ; une formation à la tête du Medef, composée de personnalités éminentes incluant bien sûr la présidente, éviterait la dilution des compétences en commissions diverses et variées, faibles dans leur utilité.

Cette formation serait la garantie de professionnalisme et de vrais services rendus aux adhérents car c'est d'assistance et d'aides concrètes dont ils ont besoin : lobbying, conseil, soutien, en contrepartie du montant des cotisations ! Il est fondamental de rétablir un rapport avec les adhérents directs. Les activités des structures paritaires ont fini par déconnecter les entrepreneurs de terrain de leurs mandants. Actuellement, les entreprises souffrent d'un appareil aussi lourd que certaines administrations que nous critiquons.

 

Pour être efficace, il faut aussi rassembler et associer la CGPME sans entrer dans une compétition stérile. Pourquoi l'Afep (Association française des entreprises privées) ne serait-elle pas intégrée au Medef ? Pourquoi signifier ainsi que les gros font bande à part ? Les mêmes services efficaces de l'Afep peuvent être rendus sous forme d'un club interne. Le Medef doit, pour être vraiment utile aux entrepreneurs, placer à la tête de ses objectifs la simplification ; la complexité coûte un milliard à notre économie, la France est classée au 114ème rang pour sa lourdeur administrative. Encore faut-il que le Medef ne soit pas atteint en interne par le syndrome de la complexité en créant des normes supplémentaires, en se laissant piéger par des conventions interprofessionnelles, des conventions de branches, etc..., qui s'additionnent au reste.

 

La communication et la pédagogie sont des enjeux prioritaires. La révolution médiatique fait qu'il faut être partout en expliquant et en réagissant à l'actualité : l'organisation patronale n'est pas assez audible et doit développer une stratégie de communication à la hauteur des enjeux, favoriser l'interactivité interne et externe, former des patrons dynamiques à monter au front. Rester force de propositions pour le gouvernement est fondamental, ainsi faut-il réfléchir à la TVA sociale. Laissons aux politiques la compétitivité de la France et l'harmonisation de la fiscalité. C'est aux patrons français d'aller conquérir les marchés et aux ambassades et aux organismes spécialisés de créer l'environnement favorable sur place. En revanche, je te suggère de nous appuyer pour lancer "la Fête des entreprises d'Europe". Ne serait-ce pas un symbole fort et (enfin !) positif que tous les pays d'Europe, le même jour, fêtent ensemble leurs entreprises !

"Une charte éthique pour chaque entreprise de France" : voilà également un objectif que je propose pour que les salariés et les Français se retrouvent sur des valeurs et la responsabilité individuelle. Ethic va sortir dans les semaines qui viennent "Ethic Value", le premier site d'auto-évaluation sur l'éthique à la disposition de chaque salarié ou dirigeant d'entreprise. Les trois ans qui viennent doivent faire triompher un Medef différent, proactif, généreux et rassembleur, "si vous ne pouvez persuader, appliquez-vous à séduire" (Auguste Detoeuf).

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