Condamnation d'Airbus à l'OMC : la réaction du patron de Boeing France

Ancien ministre de l'Industrie puis du Commerce extérieur, Yves Galland préside depuis plusieurs années aux destinées de Boeing France. Il réagit à la récente décision de l'OMC sur les aides européennes à Airbus.

L'Organisation mondiale du commerce (OMC) vient de juger que les subventions versées par les gouvernements européens à Airbus ne respectent pas l'accord de l'OMC sur les subventions, qu'elles faussent le marché et qu'elles doivent cesser. Il s'agit d'un jugement limpide qui rappelle de façon opportune les principes d'une concurrence juste et loyale.

 

Ce jugement historique doit être respecté avec deux mesures urgentes : la première, mettre un terme aux subventions sous leur forme la plus pernicieuse, à savoir les aides au lancement, pour les prochains programmes comme l'A350 ; la seconde, convertir les 4 milliards de dollars (environ 3,2 milliards d'euros) de prêts consentis par les gouvernements pour le financement de l'A380 en prêts conformes aux conditions du marché.

 

Le non respect de ce jugement ébranlerait le système commercial mondial, essentiel à la reprise de la croissance économique. D'autres pays pourraient être tentés de s'engouffrer dans cette brèche en subventionnant illégalement leur propre industrie aéronautique, créant une véritable mêlée dans le commerce mondial où les vainqueurs et les vaincus seraient déterminés par les subventions gouvernementales et non pas sur des critères d'innovation, de qualité, de prix et de service. C'est d'autant plus essentiel qu'aujourd'hui, d'autres acteurs au Brésil, au Canada, ou en Chine, envisagent de développer et de construire rapidement des avions moyens courriers, et à terme de plus gros avions, se posant comme de sérieux concurrents pour Boeing et Airbus. Il faut que la concurrence avec eux soit loyale.

 

La valeur commerciale des subventions reçues par Airbus au fil des années est estimée à 200 milliards de dollars actuels (environ 162 milliards d'euros). Il s'agit en fait d'une aide massive apportée par les contribuables français, allemands, britanniques et espagnols.

 

L'objectif est donc désormais de créer des règles de concurrence justes et loyales reposant sur un jugement sans ambigüité qui établit un nouveau cadre juridique pour les prêts gouvernementaux accordés aux constructeurs d'avions commerciaux.

 

Plus de quarante ans après sa création, Airbus doit être autonome et se comporter comme une véritable entreprise commerciale, sans le soutien des contribuables. Airbus est déjà le premier constructeur d'avions commerciaux au monde, avec une gamme de produits complète et près de 9 milliards d'euros en trésorerie pour financer le développement de ses nouveaux projets. Pour quelle raison les contribuables européens devraient-ils continuer à injecter l'argent de leurs impôts dans une entreprise privée qui dispose de telles liquidités, alors même que les gouvernements européens exigent d'énormes efforts de leur part pour financer les retraites et réduire la dette publique ?

 

Boeing ne craint pas la concurrence. Nous souhaitons simplement qu'elle s'exerce dans le cadre d'un environnement juste et loyal. Voici quelques années, les pays acteurs du commerce international ont établi des règles pour le commerce international et chargé l'OMC d'arbitrer les différends en toute impartialité. C'est exactement ce qui vient de se produire dans le secteur aéronautique. Le gouvernement américain a porté un litige de longue date relatif aux subventions européennes devant un arbitre neutre, l'OMC, en lui demandant de rendre son jugement.

 

Le respect des accords qui régissent le commerce international est essentiel au maintien d'un système d'échanges juste, ordonné, et dont les avantages sont nombreux. Si les gouvernements et les entreprises décident d'ignorer les règles établies, les forces protectionnistes reprendront de la vigueur au détriment d'un système de libre-échange juste et loyal. Airbus et les pouvoirs publics européens doivent reconnaître l'importance globale de ce jugement et faire en sorte que cette entreprise fonctionne enfin sur des bases commerciales saines lui permettant de se mesurer avec loyauté à ses concurrents, partout dans le monde.

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