Vous avez investi dans une résidence, vous avez emprunté, vous avez acquis cette résidence et puis on vous propose un boulot, vous êtes à Paris on vous propose un boulot à Toulouse, si vous n'avez pas les moyens de payer la plus-value, eh bien dans ce cas-là vous pouvez être bloqué sur le plan professionnel. » Vous voulez prendre quelques secondes pour la relire, la phrase ? Allez-y... je vous attends... Vous voulez recommencer parce que vous vous dites que ça ne veut rien dire ? Ne recommencez pas, ça ne veut rien dire ! Le problème c'est que c'est le ministre du Budget qui la prononçait, cette phrase, à la fin de la semaine dernière à la télévision. Et le problème c'est que François Baroin commentait ainsi l'un des débats les plus explosifs du moment, l'éventuelle taxation d'une plus-value sur la vente d'une résidence principale.
Un mot sur le fond : en région parisienne, justement, les prix ont augmenté de 10 % sur l'année. Un logement de 500.000 euros n'a rien d'extraordinaire. On peut donc envisager 50.000 euros de plus-value, d'ores et déjà. Prenons même les prix moyens du marché national, 210.000 euros, durée de détention, là encore en moyenne : sept ans et demi. Plus-value moyenne sur 2004-2011 : 200 % ! Vous faites les comptes, vous ramenez ça au salaire moyen, et vous continuez à penser que ça doit échapper à toute taxation ?
Aucun talent, aucun effort, aucun risque à l'origine de cette aubaine, mais la simple spéculation, les mouvements d'un marché que personne ne contrôle. Au nom de quoi serait-elle exonérée ? Parce que l'on vend souvent pour acheter plus grand, nous disent les experts immobiliers. Cette taxation, ce serait enlever quelques mètres carrés à des familles qui n'en ont déjà pas beaucoup. Dire ça, c'est reconnaître que le marché immobilier n'a aucun sens, si les prix ne sont en aucun cas capables de s'ajuster à la demande. Mais c'est surtout continuer à creuser les inégalités entre ceux qui sont propriétaires et ceux qui ne le sont pas. En gros, vous avez la moitié de la France qui peut croître tranquillement à l'abri de l'impôt (souvent d'ailleurs aidée, au départ, par une donation des parents) et l'autre partie, les locataires, qui porte la charge foncière à travers la taxe d'habitation et qui va porter tout le poids des hausses inévitables pour le rétablissement des finances publiques. Parce qu'elle est quand même là, la clé du problème : nous sommes ruinés mesdames, messieurs ! Est-il absurde d'aller prendre un peu d'argent là où il est ? Je veux dire, là où il est vraiment, pas virtuel, mais bel et bien réalisé ?
Mais encore une fois, il serait intéressant d'en parler, d'en débattre, si l'on pouvait le faire sereinement. Si l'on pouvait surtout penser que ceux qui nous dirigent cherchent à trouver des solutions. Nous savons tous que ça n'est pas le cas. Pourquoi avoir commencé avec cette phrase de François Baroin ? Parce qu'il maîtrise habituellement parfaitement son discours. Là, il improvise. Et il dit n'importe quoi. Il improvise parce qu'au fond il n'a pas de conviction. Ou plutôt, si, il en a une : dire le contraire de Christine Lagarde. De la même façon que les 35 heures sont un règlement de comptes Copé-Bertrand, cette affaire apparaît comme l'un des épisodes de la lutte de pouvoir à Bercy.
François Baroin dit qu'il veut des idées simples. Ne pourrions-nous pas tomber d'accord sur quelques éléments : on taxe le patrimoine plutôt que l'outil de production, et l'on taxe le flux plutôt que le stock, on cherche à protéger l'effort et la prise de risque, on essaie d'orienter l'épargne vers l'innovation. Qui peut être en désaccord avec ça ? Et comment prétendre alors que la taxation des plus-values lors de la revente de la résidence principale est une mesure néfaste ? J'écris ça sans illusion, les notaires qui nous gouvernent préféreront raboter le crédit d'impôt recherche, c'est tellement plus simple !
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