L'appétit des actionnaires

Par Jerôme Marin, correspondant de La Tribune à New York.
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Quand je vois les conditions actuelles sur les marchés, je me dis que l'on pourrait obtenir plus. Lors de la dernière assemblée générale de Nyse Euronext, la semaine dernière à New York, un actionnaire interpelle la direction de l'opérateur boursier transatlantique. Pourquoi devrait-il se contenter d'une prime limitée dans le cadre d'une fusion avec Deutsche Börse ? Surtout quand Nasdaq OMX et IntercontinentalExchange, avec qui le conseil d'administration refuse toujours de discuter, ont fait une offre supérieure ? D'autant plus quand les autres opérations de fusions et acquisitions (M&A), qui se multiplient ces derniers mois, se montrent beaucoup généreuses ? Des exemples récents : une prime de 78% pour le rachat de National Semiconductor par Texas Instruments, au minimum 40% pour celui de Genzyme par Sanofi-Aventis ou encore 21% pour celui de Massey Energy par Alpha Natural Resources.

"C'est le moment de parier sur les fusions et acquisitions", recommandait en substance Goldman Sachs dans une note publiée récemment. De janvier à mi-avril, 2.202 transactions avaient été enregistrées aux États-Unis, selon les données récoltées par Thomson Reuters. Montant total : 422 milliards de dollars, un bond de 126% par rapport à l'année dernière. Plusieurs facteurs expliquent cette reprise marquée des M&A outre-Atlantique. Il y a d'abord des valorisations encore considérées comme attractives, notamment sur les secteurs de l'énergie et des nouvelles technologies. Il y a ensuite une volonté de croissance externe alors que la conquête de parts de marché demeure extrêmement difficile aux Etats-Unis, comme dans les autres pays développés. Et il y a surtout les montagnes de liquidités sur lesquelles sont assises les entreprises américaines. Celles composant le S&P 500 disposeraient ainsi de près de 2.000 milliards de dollars dans leurs caisses - quasiment deux fois la capitalisation cumulée des entreprises cotées sur le CAC 40 ! Un véritable trésor de guerre qu'il faut maintenant utiliser... et qui attire les convoitises.

A commencer par celui des actionnaires. Après avoir rongé leurs freins, ils ne se contentent en effet plus du simple rebond des cours boursiers. Les indices américains ont beau avoir retrouvé leurs niveaux d'avant-crise, cela ne leur suffit pas. Ce qu'ils veulent maintenant, ce sont notamment des programmes de rachat d'actions et des hausses de dividendes. Deux étapes qui s'imposent désormais. La période des résultats trimestriels, qui s'achève à Wall Street, a ainsi été riche en annonces de ce type. L'appétit des actionnaires se concrétise également par la prime qu'ils réclament pour céder leurs titres à un potentiel acquéreur. Elle doit être substantielle car, après tout, tout le monde ne prédit-il pas que le rally actuel des marchés va encore se poursuivre ? En ne promettant que la création de valeur future pour leurs actionnaires, les dirigeants de Nyse Euronext négligent ainsi cette soif. Une porte par laquelle vont tenter de s'engouffrer Nasdaq OMX et ICE.

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