Cessons de subventionner la consommation !

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Par Valérie Segond, journaliste à La Tribune.

C'est à en perdre son latin : en 2008 et 2009, dans toute l'Europe, la crise détruit des emplois par millions et porte un coup au moral des ménages comme à leur portefeuille. Les Gaulois, eux, continuent à bâfrer, même si c'est sur un mode un peu moins boulimique. Trois ans plus tard, la croissance revient et le chômage recule. Voilà que les Français se serrent la ceinture deux mois consécutifs, ce qui est assez rare dans les annales de la statistique. Les Français défieraient-ils aussi les lois économiques ? Pas tout à fait, car tout contribue ici à faire de la consommation le moteur à toute épreuve d'une économie qui a toujours privilégié la demande sur l'offre. Quand les destructions d'emplois dégonflent la masse salariale, les amortisseurs automatiques (allocations) ou politiques (baisse de l'IR) viennent soutenir les dépenses. Et quand les salaires ne fournissent plus de coup de pouce au pouvoir d'achat, il arrive que l'inflation s'en charge, comme en 2009. Mais surtout, l'histoire de la prime à la casse illustre à merveille la longue tradition française de subvention de la consommation : de la TVA réduite à la prime à la casse, en passant par les aides au plein d'essence, mais aussi au gaz ou à l'électricité, les Ticket-Restaurant, les prises en charge des frais de transport, les chèques-vacances, etc., rien n'est trop cher pour engraisser la vache sacrée. Si la consommation ainsi subventionnée n'a pas été mesurée par l'Insee, on sait que la consommation socialisée des Français, celle qui est prise en charge par les multiples administrations, n'a cessé d'augmenter : elle ne pèse pas moins de 24 % de leur « consommation effective », contre 19 % en 1970. Or les effets posthumes dévastateurs de la prime à la casse, comme hier de la « balladurette » ou de la « juppette », montrent que ce modèle n'est pas durable. Car ces subventions, qui ont toujours été obtenues par un chantage à l'emploi des professionnels, dévoient les marchés, faussent leur analyse et bloquent les inévitables ajustements. Sans oublier qu'elles donnent aux responsables politiques l'illusion d'agir pour le bien de tous, sans en mesurer le prix, au lieu de tout faire pour créer les conditions d'une offre véritablement compétitive.