Les deux lectures du surendettement

Par Valérie Segond, journaliste à La Tribune.
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La France compte donc près d'un million de ménages surendettés selon les chiffres de la Banque de France, pour un encours moyen de 45.000 euros, très supérieur à la moyenne européenne. Pour les personnes prises à la gorge par leurs créanciers, c'est un drame. Mais pour la santé du pays, faut-il s'en alarmer, comme on s'inquiète de ces économies fragiles pour vivre trop outrageusement à crédit ? Non, si l'on considère que ce surendettement n'est pas révélateur de l'endettement moyen des Français, qui demeure beaucoup plus faible que celui des Américains, des Anglais, des Espagnols, des Japonais, et même de ces Allemands que l'on érige à tout-va en parangons de vertu. Contrairement aux idées reçues, le Français, ce consommateur impénitent, vit moins à crédit que ses voisins. Nos banques d'ailleurs le savent bien, qui enregistrent de très faibles défauts sur les crédits aux particuliers. Construit sur une importante dette publique, le modèle français nous a épargné un surendettement privé national.

Soit. Seulement, cette approche d'économiste, qui compare les moyennes entre elles, est un bon exemple de lecture biaisée conduisant à des conclusions fausses. Car la forte hausse du surendettement livre une information beaucoup plus fine sur la fragilité de notre économie, que résume ainsi l'économiste de l'OFCE, Eric Heyer : "en France, les personnes frappées par le chômage pendant la crise le sont restées. Avec la fin de leurs droits, elles sont tombées dans la pauvreté jusqu'à ne plus pouvoir rembourser leurs crédits." Car, même lorsqu'elle repart comme aujourd'hui, la croissance en France ne crée pas assez d'emplois pour profiter aux chômeurs de longue durée. Voilà pourquoi la France connaît actuellement cette situation paradoxale et alarmante, source d'illusion d'optique et d'erreur de jugement : derrière une économie qui redémarre mollement se cache une pauvreté qui s'étend. 

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Commentaire 1
à écrit le 14/11/2011 à 22:32
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A Valérie SEGOND Bonsoir. Erreur de jugement, dites vous: De mémoire , votre confrère "Les Echos" rapportait il y environ dix ans le nombre de 1.000.000 de français en dessous du seuil de pauvreté. Il semblerait que durant cette période le seuil es...

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