Grèce, mais que font les pompiers ?

Défaut de la Grèce et sortie de l'euro. Bond en avant dans une Europe fédérale. Nouveau plan de redressement. Trois scénarios pour sauver la Grèce de l'embrasement sont à l'étude. La cacophonie actuelle est consternante car si une solution est à portée, les périls sont réels. Et le temps n'a jamais autant été compté.
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Sans doute eût-il mieux valu que la Grèce ne rentre pas dans l'euro. En conservant sa drachme, elle n'aurait pu s'endetter inconsidérément comme elle l'a fait sous le parapluie de l'euro et la sous-compétitivité de son économie aurait pu être corrigée par une dévaluation. Aujourd'hui, la Grèce doit mener une « dévaluation intérieure » en faisant baisser salaires, prestations sociales et valeur des actifs. Elle doit encore pratiquer une thérapie de choc pour rendre plus compétitive son économie en l'ouvrant à la concurrence. Elle doit enfin être soulagée par l'Europe dans le portage de sa dette. Même si les efforts de la Grèce sont sérieux et les résultats appréciables, la Grèce est entrée dans la spirale infernale où rigueur et taux d'intérêt élevés étouffent son économie, ce qui accroît le risque de défaut et pousse donc à une nouvelle augmentation des taux. La situation n'est guère tenable. Trois scénarios sont sur la table.

 

1 Le défaut de la Grèce et sa sortie de l'euro. Ce scénario hante les marchés. Il est pourtant peu vraisemblable. Car si la Grèce faisait défaut, les banques et les assurances - principalement allemandes et françaises - qui détiennent des obligations et des actifs grecs seraient sérieusement touchées de même que la Banque centrale européenne. Mais ce serait surtout l'explosion du système bancaire grec. Déjà la contagion menace le Portugal, l'Irlande, l'Espagne, l'Italie ou la Belgique. Le seul exemple connu de sortie d'une zone monétaire par la dévaluation est celui de la sortie du Mali du franc CFA en 1962 dont l'échec fut piteux. Tout sera donc fait pour éviter un tel scénario.

 

2 On dit et on répète de plus en plus qu'il existerait une voie de sortie par le haut, celle de l'émission commune et solidaire d'obligations européennes accompagnée d'un Trésor européen, d'un gouvernement économique et de politiques fiscales et sociales harmonisées. Les mêmes ajoutent volontiers qu'il s'agit là d'une condition essentielle au bon fonctionnement de l'euro, hélas négligée à l'origine. Rien n'est plus faux, car une monnaie commune à plusieurs pays peut parfaitement exister (à l'instar du franc CFA ou de l'étalon or) sans qu'il soit besoin d'un gouvernement central. Mais ceci exige à la fois une stricte gouvernance monétaire afin d'empêcher un pays de laisser filer sa dette au-delà de sa capacité de remboursement et une très grande flexibilité économique pour remplacer les ajustements monétaires par des ajustements de prix. Ces deux conditions étaient censées être remplies et par le traité de Maastricht et par l'agenda de Lisbonne sur la compétitivité. Ceux qui disent aujourd'hui que l'euro ne peut pas fonctionner sans un super-gouvernement et un super-budget fédéral avouent implicitement qu'ils ont menti aux Européens pour faire adopter une version de l'euro dont ils savaient qu'elle ne fonctionnerait pas ! On pourra sans doute - non sans mal - obtenir des Européens une solidarité financière limitée pour solder les erreurs et les indisciplines du passé mais il serait explosif de vouloir forcer une solidarité européenne intégrale pour corriger les différences de compétitivité au sein de l'Europe.

 

3 Un nouveau plan de soutien de la Grèce est nécessaire, de l'ordre de 100 milliards d'euros. La facture ne pose pas de problème mais l'équation est complexe. Si les prêteurs - banquiers et assureurs - doivent en assurer une partie, encore faut-il savoir doser l'effort qu'on leur demande afin d'éviter d'affaiblir le système financier européen. Et trouver une formule pour éviter que la dette grecque soit comptablement considérée comme faisant défaut, ce qui pourrait provoquer un tsunami financier européen. D'où les plans combinant le renouvellement « volontaire » par les créanciers de la Grèce d'une large partie des prêts arrivant à échéance et la souscription d'obligations garanties à plus faibles taux d'intérêt indexés. Ou même le rachat par le Fonds européen de stabilité financière d'obligations décotées sur le marché secondaire. Ce plan suffira-t-il ? On peut en douter. Toujours est-il que si les autorités européennes se refusent à parler aujourd'hui de défaut ou de restructuration, cette possibilité est explicitement prévue et organisée - même si les modalités apparaissent encore bien floues - dans le Mécanisme européen de stabilité adopté en 2010 et qui doit remplacer, en juillet 2013, l'actuel Fonds européen de stabilité financière. Ce nouveau plan de soutien a donc le mérite de gagner du temps. Le temps, espère-t-on, d'éloigner les risques sur l'Espagne et l'Italie et si possible aussi l'Irlande et le Portugal. Le temps encore de consolider le système bancaire. La voie est étroite mais le temps presse. L'impatience des marchés pourrait précipiter l'exigence d'une restructuration profonde et la colère des Grecs pourrait tout ruiner.

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