Pantalonnade et lucidité

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Par Éric Walther, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune

Qu'il n'y ait pas de malentendu : Arnaud Lagardère a parfaitement le droit de vivre les aventures amoureuses qu'il souhaite, et personne ne peut prétendre en juger, en tout cas publiquement. Il n'empêche. Si « La Tribune » a choisi de s'interroger sur sa position à la tête d'un groupe qui pèse lourd dans le paysage économique et politique français, c'est que la vidéo mise en ligne la semaine dernière dépasse les limites de la raison. Il ne s'agit pas là d'une sympathique mise en scène de la passion d'un nouveau couple, façon double page de « Gala ». Non, disons-le sans détour, ce film est ridicule, consternant... inquiétant. Le buzz qu'il a provoqué en témoigne tragiquement. Les mauvais esprits pourront certes s'ébaudir de ce coup de maître sur la Toile pour Lagardère, dont le développement dans le numérique a longtemps suscité bien des critiques. Mais l'humiliation, l'indignation ressenties à l'intérieur de l'entreprise, le silence gêné observé par le monde des affaires montrent que cette pantalonnade est définitivement de trop. Alors, de deux choses l'une. Soit Arnaud Lagardère a réellement choisi d'exercer le pouvoir que lui confèrent ses titres avec une distance qui relève plus de la désinvolture que de la délégation (ce que beaucoup d'observateurs tiennent pour acquis depuis déjà un certain temps). Cette affaire ne va alors qu'aggraver les problèmes de gouvernance au sein du groupe avec les conséquences que l'on connaît : ligne stratégique floue, bataille des chefs livrés à eux-mêmes... Soit, au contraire, il se prétend là et bien là, aux commandes, auquel cas on est en droit de douter de ses capacités ou à tout le moins de sa lucidité, qualité primordiale d'un patron qui dirige 28.000 personnes.