Le retour du débat interdit

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Par Philippe Mabille, directeur adjoint de la rédaction à La Tribune.

Solidarité avec nos camarades grecs ! Répondant à l'appel de Jean-Claude Trichet d'une mise en oeuvre rapide de l'accord du 21 juillet organisant le sauvetage de la Grèce, la France est donc le premier pays à donner l'exemple. D'ici jeudi, le Parlement aura voté la loi de finances rectificative qui autorise le déblocage de 15 milliards d'euros supplémentaires pour Athènes, portant à 60 milliards l'effort total apporté par le contribuable français en garantie de la dette hellénique. Ecouté par Paris, le président de la BCE l'est moins par les autres capitales. Le processus démocratique européen est tellement lourd qu'il faudra attendre décembre le vote des Slovaques.

Presque cinq mois d'attente, depuis l'accord des chefs d'Etat et de gouvernement, c'est Ubu roi au royaume de l'euro ! Et cela nous condamne à voir les marchés continuer de dériver au rythme des hésitations des uns ou des autres sur l'opportunité de combler ce puits sans fond que semble être devenue la Grèce. Le plus surprenant, quand on voit la vigueur des oppositions qui se manifestent en Europe du Nord, c'est que le soutien n'a pas vraiment fait débat chez nous. Comme s'il allait de soi que la France, pays inventeur de la monnaie unique, devait défendre sa créature envers et contre tout. Certes, il y a au Front national, chez les souverainistes ou bien à gauche de la gauche (et un peu à gauche tout court), un important foyer de contestation.

Mais il ne se traduit pas politiquement par une pression équivalente à celle que connaissent la Finlande ou l'Allemagne, obligées de composer avec des coalitions très divisées sur le sujet. Comme si, en France, ce débat était interdit, tabou, inutile. Comme si les Français considéraient, après avoir fait tant d'efforts, dans le passé, pour bâtir l'euro, que l'abandon de la Grèce, un confetti à l'échelle de la dette de l'Union européenne, ne valait pas de prendre le risque de déconstruire le tout.