Partez, monsieur Servier

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Par Eric Walther, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune.

Un poison lent. Voilà ce que nous administrent depuis deux ans les laboratoires Servier. L'affaire du Mediator était déjà un drame humain et sanitaire épouvantable. Fort heureusement, l'arrêt de la commercialisation de ce médicament va mettre un terme à l'hécatombe. Mais les répercussions du scandale, elles, continuent leurs ravages. D'abord sur les fondements mêmes d'un système de santé qui repose avant tout sur la confiance. Le doute, la suspicion distillés par les nauséabondes pratiques d'une entreprise autocratique, et les incompétences, les compromissions qu'elles révèlent sur une "société" du médicament où se confondent dangereusement intérêt public et cupidité privée sont dévastateurs. Le contrat de santé qui lie les Français à leur Sécurité sociale en sortira sali.

Sur l'action des responsables politiques ensuite. Parlons plutôt d'inaction, d'impuissance. Faut-il rappeler que les laboratoires pharmaceutiques doivent leur existence au remboursement de leurs médicaments avec de l'argent public ? Et voilà qu'une entreprise, qu'un homme, Jacques Servier, continuent de nier les évidences, de mépriser ceux qui les font vivre, de truquer la vérité en tentant de caviarder un rapport sénatorial sur son Mediator. Stupéfiant.

Sur l'entreprise, enfin. En l'enfermant dans une logique de bunkerisation, son fondateur lui rend le pire des services. Un outil industriel, l'emploi de 22.000 salariés dans le monde, une réputation sont en jeu. Ecrasés par ce qui semble pourtant n'être plus que l'ombre d'un patriarche paranoïaque, les équipes de Servier ont besoin de passer à autre chose. Pendant qu'il est encore temps. Pour toutes ces raisons, il est urgent que vous partiez, monsieur Servier.