Haro sur les niches ?

Stock-options, retraites chapeaux, niche Copé : autant d'exemples de niches fiscales et sociales qui résonnent souvent dans l'opinion publique comme des cadeaux envers les riches et les grandes entreprises.
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A quelques mois de l'élection présidentielle, les critiques ressurgissent, s'appuyant sur un rapport récent de l'Inspection générale des finances (IGF). Celui-ci épingle 53 milliards d'euros de dispositifs jugés « inefficients » et favorisant les comportements opportunistes. Un chiffre qui fait écho avec l'objectif socialiste de supprimer 50 milliards de niches fiscales dont le produit financerait à la fois la réduction des déficits et sa politique socio-économique. Haro sur les niches donc ?

Elles peuvent en fait contribuer à mobiliser les prélèvements au service d'objectifs socio-économiques. Certaines niches ont des effets avérés sur l'activité (le crédit d'impôt recherche notamment) ou sur l'emploi (par exemple, la niche Fillon sur les bas salaires). D'autres, comme l'exemption de cotisations sur les titres restaurant, ne sont certes pas jugées efficientes, mais représentent un soutien au pouvoir d'achat non négligeable en période de crise.

Par ailleurs, la suppression des 10 milliards d'euros de niches que l'IGF juge « inutiles » aurait pour conséquence une contraction du PIB de 0,3 % et une hausse de 55.000 du nombre de chômeurs, ce qui est loin d'être négligeable. Quelles niches supprimer et dans quel but ? Certes, on peut par exemple émettre des réserves sur certains dispositifs pour l'investissement en outre-mer, qui favorisent l'optimisation fiscale de quelque 12.000 bénéficiaires. Il n'en demeure pas moins que les DOM ont besoin d'un soutien spécifique pour le développement du logement social, de l'activité industrielle et des énergies propres. La suppression de niches doit donc être accompagnée d'un plan réutilisant - au moins partiellement - les recettes perçues pour soutenir l'économie de façon plus efficiente.

La transparence, à cet égard, est une nécessité. Car, parmi les 53 milliards de niches décriées par l'IGF, près de 20 milliards concernent l'abattement d'impôt sur les pensions de retraite, la prime pour l'emploi, les investissements en Corse et dans l'outre-mer, l'emploi à domicile, l'intéressement et la participation ou encore les chèques-vacances et titres restaurant. Ces niches sont-elles sur la sellette pour la gauche, au risque de mécontenter une partie de son électorat ? Si elles sont épargnées, il faudra dès lors, pour atteindre l'objectif de 50 milliards de réductions, s'attaquer à des dispositifs jugés efficaces. Leur remise en cause est donc moins légitime, car elle aurait un impact bien plus corrosif sur la croissance et l'emploi.

 

Quand la gauche entend supprimer l'exonération des heures supplémentaires, il faut bien voir que ce serait mettre fin à l'un des seuls « cadeaux fiscaux » qui profitent aux classes modestes.

Naturellement, le choix n'est en rien déchirant pour la gauche, s'il s'accompagne d'une politique générale compensatoire en faveur du pouvoir d'achat des ménages défavorisés. Pourtant, Martine Aubry, dans un discours de juillet 2011, se distingue par sa volonté de financer l'augmentation de 50 % du budget de la culture au moyen de la suppression de ce dispositif. Voilà une proposition surprenante qui révèle une « rupture » avec l'électorat populaire. Car n'est-ce pas la « mise à mort » d'un avantage dont bénéficient les classes populaires au profit des classes « aisées », bien plus consommatrices de produits culturels ? Le débat sur les niches est un vrai jeu de mikado : entre coup de rabot et suppression totale, il faudra agir subtilement pour réduire les déficits publics sans toutefois déprimer la croissance, l'emploi ou le pouvoir d'achat. Et comme une partie non négligeable des niches épinglées par l'IGF bénéficie également aux classes pauvres et moyennes, nous, citoyens, avons le droit à la transparence sur les dispositifs réellement menacés par chaque candidat, avant d'aller voter !

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