"Les mesures du plan Fillon vont mécaniquement amputer le pouvoir d'achat de tous"

Jérôme Cahuzac a livré son analyse du budget 2012 et du plan de rigueur du gouvernement.
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Le plan de rigueur du gouvernement et les prévisions de croissance permettront-ils de tenir les objectifs de réduction du déficit public ?

La croissance ne sera pas celle prévue en lois de finances. Elle sera même inférieure aux prévisions revues à la baisse aussi bien en 2011 que, surtout, en 2012.

Faut-il pour autant renoncer aux objectifs de réduction du déficit ?

L'origine de cette baisse de la croissance n'est pas uniquement nationale. Elle résulte pour beaucoup de l'incapacité pour le couple franco-allemand d'arrêter une décision, puis de s'y tenir pour traiter la crise de la zone euro. Il faut affirmer la solidarité de la zone euro à l'égard de la Grèce. Cela suppose de créer de nouveaux outils de mutualisation tels que les euro-obligations qu'ont hélas refusé Angela Merckel et Nicolas Sarkozy lors du sommet de l'Elysée en août. On aura d'ailleurs remarqué que la situation dévisse depuis cette annonce, parfaitement contradictoire avec le bon accord du 21 juillet conclu par les pays de la zone euro. Mais il y a aussi une cause nationale. L'iniquité du système fiscal et les promesses non tenues contribuent, par l'absence de perspectives et le sentiment d'injustice qui en résulte, à ralentir la croissance. Car la confiance n'est plus là.

Comment jugez-vous le plan de rigueur ?

Ce plan, par des mesures comme la taxation des contrats de mutuelles ou l'augmentation de la CSG, va mécaniquement amputer le pouvoir d'achat de tous. Or, sans croissance, l'ajustement budgétaire sera très délicat. Il est donc curieux de prendre des mesures qui vont objectivement la pénaliser puisque c'est la consommation des ménages qui assure pour 60 % la croissance du PIB en France.

Il est prévu de taxer de manière exceptionnelle les hauts revenus. Que préconisez-vous de votre côté ?

Cette mesure devrait rapporter 200 millions d'euros, voire 300 millions si elle est étendue à d'autres foyers. Or, la suppression de l'ISF provoque une perte de recettes de près de 2 milliards d'euros en faveur notamment de ceux que l'on sollicite maintenant pour 5 fois moins ! Les Allemands ont instauré une tranche supplémentaire à 45 % pour les revenus supérieurs à 250.000 euros. Les Britanniques en sont eux à 50 %. Je suggère aussi une tranche exceptionnelle à 60 % pour les revenus supérieurs à 1 million d'euros pour en finir avec les rémunérations invraisemblables de certains dirigeants. Concernant les niches fiscales, la politique menée est incompréhensible ou erratique. On commande une étude à l'inspection des finances et on fait le contraire de ce qui est recommandé. L'avantage fiscal procuré par les niches au titre de l'IRPP devrait être plafonné en valeur absolue à 15.000 euros. On épargnerait ainsi les classes moyennes et on arrêterait l'hémorragie fiscale. Cela laisserait le temps de poursuivre le travail entamé par l'IGF sur l'efficience réelle de ces niches. Mais il faudra aussi de vrais choix politiques pour faire beaucoup d'économies, si on les veut durables. Or, les économies faites cette année l'ont été de façon dispersées et un milliard de plus est annoncé sans que l'on sache d'où il viendrait. Tout cela n'est pas de bon augure.

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Commentaire 1
à écrit le 29/09/2011 à 10:30
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Oui, effectivement, mais on a tout faux sur la politique fiscale suivie depuis 2007 et avant....Il faut savoir que les revenus du Kal sont moins imposés que ceux du travail. Si je m'en réfère à certaines stats: rev du Kal en 2007: 174 Mds ?, prélèvem...

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