Une forte réduction des dépenses de fonctionnement

Par Christian Saint-Etienne, professeur au Cnam, membre du Conseil d'analyse économique.
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Le gouvernement français a annoncé des objectifs de réduction du déficit public qui sont remarquablement déconnectés de la situation de crise dans la zone euro. Le déficit serait à 5,5 % du PIB en 2011 et à moins de 4,5 % du PIB en 2012, alors même que la croissance devrait être au mieux de l'ordre de 1,5 % par an en 2011-2012. Le poids de la dépense publique française dépasse de 8 points de PIB celui de la moyenne des autres pays membres de la zone euro.

S'il faut éliminer rapidement le déficit public structurel, c'est-à-dire le déficit comptable corrigé des effets de la conjoncture, afin de stabiliser la dette publique, puis de la réduire en pourcentage du PIB, il faut surtout le faire en respectant les trois principes suivants :

- la baisse du déficit structurel doit passer essentiellement par la baisse de la dépense publique plutôt que par la hausse des impôts ;

- la baisse du déficit structurel, et donc de la dépense publique, ne doit pas se faire au détriment de la capacité d'action de l'État stratège qui doit, au contraire, voir ses moyens accrus. Il faut simultanément réduire les dépenses de fonctionnement et augmenter les dépenses d'investissement (éducation, R&D, infrastructures) ;

- si la baisse de la dépense publique doit intervenir aux deux tiers par une vigoureuse politique de baisse des dépenses de fonctionnement, la hausse des impôts doit impérativement être le fruit d'un double mouvement : allégement des impôts sur les forces productives, avec notamment une forte baisse de l'imposition des bénéfices réinvestis par les entreprises et une baisse du poids des charges sociales, et donc une hausse des impôts touchant la consommation et de la CSG.

Ces principes s'appliquent à tous les pays européens qui doivent, chacun, réduire significativement leur déficit public et collectivement préparer l'avenir en annonçant des plans de développement des infrastructures européennes.

Or la France fait tout le contraire. L'essentiel de la baisse du déficit s'opère par une hausse de la fiscalité. C'est le cas pour la Sécurité sociale qui bénéficie en 2012 de 6,5 milliards d'euros par une imposition accrue des revenus du capital et des plus-values immobilières et par la hausse du forfait social. C'est le cas pour les collectivités locales qui ont fortement augmenté leur fiscalité depuis trois ans, tandis que l'État est engagé dans un exercice permanent de réduction des niches, c'est-à-dire de hausse des impôts directs. Quitte à prendre ces mesures de hausse de la fiscalité, il eût fallu annoncer simultanément une baisse de 20 milliards d'euros des dépenses (7 milliards d'euros sur l'assurance-maladie par la baisse des prix des médicaments et l'encadrement des dépenses de la médecine de ville, 7 milliards sur les collectivités locales en les intégrant à l'objectif de Maastricht comme en Allemagne ou en Espagne, 6 milliards sur l'État par la réduction des subventions). À force de différer l'ajustement, il sera plus douloureux quand la dette de la France sera directement attaquée.

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