Banques : les comptes ne sont pas tous bons

Par Philippe Mabille, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune.
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Tout va très bien madame la marquise", avaient répondu le 27 août dernier les banques européennes à l'appel de Christine Lagarde à renforcer massivement leurs fonds propres. Après une phase de déni, les autorités politiques européennes se sont rangées aux arguments du FMI. Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, appelle désormais à une recapitalisation "urgente" des banques, indispensable pour sortir la zone euro d'une crise de la dette qui atteint une "ampleur systémique". Le Rubicon franchi, il reste néanmoins de nombreuses questions en suspens. On peut les résumer simplement : qui, combien, quand et comment ?

La réponse aux deux premières va venir de la nouvelle vague de "stress tests" sur la solidité des banques, en espérant que celle-ci sera plus sérieuse que les précédentes, qui avaient éludé le cas des banques irlandaises puis celui de Dexia, le "Lehman Brothers" européen. Pour les banques françaises, hormis peut-être la Société Générale, la plus malmenée en Bourse, et le Crédit Agricole et BPCE, un peu "justes", l'oukase de Bruxelles reste en apparence sans objet, puisque le nouveau ratio de fonds propres "durs" de 9% des actifs est soit déjà atteint, soit pas très éloigné. Faudra-t-il aller au-delà et prendre une marge de sécurité ? Nicolas Sarkozy devra répondre, rapidement, à cette question. Bien sûr, les banques arguent avec raison qu'aucun niveau de capital, fût-il de 100%, n'est en mesure de garantir les déposants contre un risque généralisé de défaut sur les dettes souveraines. Et que seul l'Etat peut jouer ce rôle de prêteur en dernier ressort. Les banques disent aussi qu'à vouloir trop renforcer leur capital, le comité de Bâle joue contre la croissance en favorisant le resserrement du crédit. Ce n'est pas faux. Pourtant, si le besoin de recapitalisation est bien de 200 à 400 milliards d'euros, comme on le dit, comment imaginer que les banques françaises, même les plus solides, puissent échapper au mouvement général ? Ce serait courir le risque de laisser perdurer la défiance.

Pour rassurer les clients sur la sécurité de leurs dépôts, les banques ont désormais le pistolet sur la tempe : soit elles se surcapitalisent, soit elles s'exposent à la surréglementation. A voir l'inquiétude de l'opinion, révélée par la primaire socialiste, elles auront même peut-être les deux ! Reste le comment, c'est-à-dire qui va payer l'addition. Ce point n'est pas encore clair et se réglera sans doute au cas par cas, selon les pays. Le mieux serait que les banques trouvent elles-mêmes les ressources nécessaires, sur le marché, auprès d'investisseurs riches en pétrodollars et/ou en renonçant pendant quelques années aux bonus et dividendes pour faire des réserves. Dans les cas les plus extrêmes, peut-être faudra-t-il que l'Etat prenne des participations, directement ou bien via le Fonds européen de stabilité financière (FESF), avec le risque que, cette fois, le contribuable réclame des comptes.

Au final, c'est la survie du modèle de banque universelle défendu en Europe continentale qui est en jeu. Et ce qui semble sûr, c'est que la finance anglo-saxonne espère bien tirer les bénéfices de cette course aux fonds propres imposée à l'Europe...

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