Réindustrialiser ? Questions de confiance !

La solution pour réindustrialiser la France n'est pas de tenter de copier le modèle allemand. Il faut retrouver une perspective de long terme. Les politiques, au niveau tant national que local, doivent redonner l'exemple. Renouer avec la politique industrielle et retrouver le sens de l'intérêt général sont aujourd'hui nécessaires.
Copyright Reuters

On va tout résoudre en relançant l'industrie et en copiant l'Allemagne ! À force d'oublier la spécificité du modèle allemand (culture de solidarité entre grands groupes et PME) et de se payer de mots, ce sont nos maux qui nous rattrapent. Et pourtant, nous pouvons et devons réindustrialiser nos territoires, relancer l'emploi, la qualité de vie, notre attractivité. Nous disposons des atouts nécessaires pour une sortie de crise durable par le haut. Mais à des conditions précises. Nous avons analysé sur le terrain, en Europe, aux États-Unis, une série de réussites durables d'entreprises de tous secteurs et de toutes tailles. Ces sociétés, de la Favi en France, d'Irizar en Espagne aux Américains Costco, SAS (qui pratique les 35 heures flexibles depuis 1976...) démontrent que l'on peut produire objets et services sur nos sols occidentaux, dans des conditions parfaitement rentables.

Nous constatons dans "Aux actes, citoyens ! De l'indignation à l'action" (*) que ces succès vérifiés sur la durée sont fondés sur des principes simples. Leurs dirigeants résistent à la maximisation des profits financiers immédiats. Ils gèrent l'entreprise réelle, pas ses fluctuations boursières. D'ailleurs, SAS n'est pas en Bourse !

Ces entrepreneurs ont des ambitions à long terme ; leur capital est patient.

Leurs managements ne sont pas tayloriens, leurs stratégies respectent la dignité, les intérêts légitimes de l'autre : employés, clients, administrés, partenaires...

Ils gèrent la complexité du contexte et les aléas qu'elle génère : leur organisation est réactive.

Ces sociétés ont rejeté les organisations en silos. Elles écoutent, responsabilisent chacun ; elles appliquent le droit à l'erreur, récompensant les initiatives, recherchent les synergies pour créer plus de valeur avec moins de risques. Pourquoi ces principes éprouvés ne se généralisent-ils pas ?

Une partie du patronat se défausse sur les politiques en se plaignant de contraintes, d'ailleurs réelles. Les politiques observent que les stratégies et le style de management des entreprises ne dépendent pas d'eux. Ils oublient que l'État est aussi employeur, donneur d'ordres, souvent mauvais payeur. Nos politiques proposent des mesures techniques, quantitatives, gèrent dans l'immédiat la pénurie. Ils ne s'attaquent pas (encore) au fond, ce gâchis de ressources humaines à l'origine de notre faible compétitivité et de la réticence de beaucoup à rester plus longtemps à travailler dans des cadres peu épanouissants où les seniors sont traités de charge.

Au cours de nos tournées sur le terrain nous incitons citoyens et entrepreneurs à interpeller chaque responsable politique national ou territorial : qu'il prenne personnellement position sur sept questions. Que va-t-il faire pour que...

1. L'école devienne, surtout par ses pratiques, un lieu d'apprentissage de la responsabilité, des partenariats gagnants-gagnants, de l'ouverture et de la tolérance ?

2. Le secteur public devienne exemplaire comme employeur, donneur d'ordres, fournisseurs de services aux citoyens ?

3. Les aides publiques nationales, régionales, locales, aillent en priorité aux acteurs qui construisent l'avenir du territoire en respectant les trois bases d'un succès durable énoncées plus haut : un management respectueux des hommes, favorable à l'innovation ?

4. La France (et l'Europe) se dote d'une vision des enjeux majeurs, d'une politique industrielle cohérente (incluant les services), servie par tous les ministères sans discordances ?

5. Le tissu d'entreprises soit revitalisé par des conditions favorables à la croissance des PME innovantes : simplifier réellement les procédures, ouvrir les marchés publics aux petites entreprises - ce dernier objectif implique une discrimination positive (cf. Small Business Act américain) jusqu'à présent bloquée par les lobbies ?

6. L'État de droit démocratique soit protégé, parfois rétabli, face à la pénétration d'intérêts particuliers qui, par connivences et/ou corruptions, réduisent les possibilités d'effectuer les choix d'intérêt général pour gérer en toute transparence la santé publique, les ressources nationales et locales (notamment dans les marchés publics) ? Cela implique l'indépendance des compétences conseillant État et collectivités, plus une action au niveau européen contre les réseaux mafieux qui détournent les ressources publiques.

7. La classe politique retrouve en France et en Europe la confiance et le respect des citoyens, depuis des années tombés à un niveau médiocre, d'où des dangers majeurs pour l'Europe ?

Nous sommes arrivés à un stade critique où l'indignation ne suffit plus. Chacun de nous doit se déterminer. Plus d'échappatoire. Aux actes, citoyens !

(*) Maxima-Laurent du Mesnil éditeur

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 4
à écrit le 30/04/2012 à 15:42
Signaler
Pourquoi vouloir réindustrialiser dans un pays qui montre du doigt les chefs d'entreprise ? Pourquoi vouloir réindustrialser dans un pays où la réussite est montrée du doigt ? Pourquoi vouloir réindustrialiser dans un pays où le futur président de la...

à écrit le 30/04/2012 à 15:36
Signaler
Il n'y a légitimité de l'Etat uniquement s'il y a effiscience dans son travail. Ce qu'il faut c'est le remettre à sa place. Qui veut d'un régime totalitaire qui supprime la liberté des citoyens? Qui veut des politiciens dont l'incompétence, la perver...

à écrit le 05/01/2012 à 6:15
Signaler
Bonjour messieurs, Il me semble que vous placez trop d'attentes dans l état (aides publiques). Dans un premier temps, je pense que l'état devrait essayer de bien faire ce pourquoi il est attendu (sécurité, éducation, transport, loi) avant d'envisager...

à écrit le 22/11/2011 à 22:39
Signaler
Bonjour, cela devient une litanie -depuis l'avènement de Sarkosy vous en parlez et vous laissez filer nos moyennes industries, vous saccagez l'école -les enfants ne savent pas compter ni expliquer un texte à 14 ans, et les parents ne leur apprennent ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.