Sortir du cercle vicieux entre banques et souverains

Par Nicolas Véron, économiste (Bruegel), chercheur invité au Peterson Institute for International Economics (Washington).
Brugel

La crise de la zone euro continue d'évoluer sur de multiples fronts, mais le secteur bancaire reste à l'épicentre. Les garanties apportées par chaque État membre à ses banques domestiques se combinent aux niveaux élevés de dette souveraine domestique détenue par les banques des pays périphériques pour créer un couplage de plus en plus fort entre les conditions respectives de financement des États et des institutions financières dans chaque pays.

Il en résulte un cercle vicieux de renationalisation des conditions de crédit et de fragmentation de l'espace financier européen. Dès lors qu'un euro déposé dans une banque grecque ne vaut plus nécessairement autant qu'un euro dans une banque allemande, la pérennité de l'union monétaire est gravement menacée.

Loin de contrer cette dynamique, le plan de recapitalisation adopté fin octobre tend à l'accentuer. De nouvelles garanties sont introduites, mais exclusivement au niveau national. Les ratios de fonds propres, qui doivent être portés à 9 % à la mi-2012, sont évalués sur la base d'une mesure des actifs souverains à la juste valeur même lorsqu'ils sont détenus jusqu'à l'échéance.

Cette application de la « full fair value » va bien au-delà de ce qu'exigent les normes comptables IFRS tant décriées. Or, si le principe de juste valeur est sain en matière d'information financière, il devient dangereusement procyclique s'il est appliqué sans filtres prudentiels dans les calculs de capital réglementaire. Le risque est non seulement un rationnement du crédit mais aussi une allocation économiquement inefficace de celui-ci, avec des conséquences qui pourraient se révéler sérieusement négatives pour l'activité économique.

Il est urgent d'infléchir cette trajectoire. La politique de liquidité sans précédent mise en place par la Banque centrale européenne est utile, mais pas suffisante. Des changements sont nécessaires des deux côtés de l'équation liant crédit souverain et financement des banques. D'une part, des mécanismes de garantie à l'échelle de la zone euro devraient suppléer ou soutenir les dispositifs nationaux, au moins pour les dépôts des particuliers afin d'endiguer le risque de panique bancaire dans les pays périphériques. D'autre part, un remplacement partiel des portefeuilles de dette nationale dans le bilan des banques par des instruments émis au niveau de la zone euro devrait être envisagé, en fonction de l'avancement des discussions sur le front budgétaire, afin de réduire les biais domestiques déraisonnablement élevés dans les banques de certains pays, dont l'Espagne et l'Italie.

Évidemment, de telles initiatives exigeraient un engagement politique bien plus fort que celui que montrent actuellement nos dirigeants. Mais il ne peut y avoir d'union monétaire durable sans un système bancaire intégré, ce qui exige un cadre d'action publique de type fédéral, en application du principe de subsidiarité. Rien n'est simple dans ce domaine, qu'il s'agisse de la responsabilité des autorités publiques devant les citoyens européens, insuffisamment assurée par l'actuel Parlement européen, ou de l'articulation entre zone euro et Union européenne à 27, rendue plus complexe encore par le veto britannique lors du sommet du 9 décembre.

L'affirmation politique de l'intégrité du système bancaire de la zone euro ne nécessite pas, en tant que telle, un changement des traités. Mais elle présuppose une politique financière commune, et impose de transcender les liens puissants et multiformes entre système bancaire et système politique qui existent dans chacun des États membres, même si leurs modalités varient beaucoup d'un pays à l'autre. Naturellement, la création d'une « union bancaire », en parallèle à l'union budgétaire désormais préconisée par Mme Merkel, n'abolirait pas toutes les spécificités nationales et locales, et heureusement. Aux États-Unis, plus d'un siècle a séparé la création d'une charte bancaire fédérale (1863) de l'avènement d'un véritable marché bancaire intégré. Mais sans avancée significative vers un système bancaire indépendant des conditions de crédit de chaque État membre, il n'y aura pas d'union monétaire qui tienne.

 

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Commentaires 2
à écrit le 26/12/2011 à 15:52
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depuis le temp que les banque scentrale injecte du pognons, si ce system avais un infini chance de fonctionné il l'aurais fait :)

le 27/12/2011 à 8:44
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Que de fautes !

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