Ne posons plus de rail

Par Philippe Cahen  |   |  434  mots
Le Congrès mondial des systèmes de transport intelligents (STI) de Bordeaux a démontré que le véhicule autonome (voiture, camion bus), géoconduit, est pour bientôt, ralenti seulement par la législation, c'est l'affaire de dix ou quinze ans.

En 2030, on ne se déplacera plus comme en 2015. Le chantier des transports du Grand Paris vient d'être lancé avec le tunnelier Magaly pour une prolongation de la ligne 14 vers 2025.Est-ce une bonne solution ? Cela fait penser à la Bibliothèque nationale François-Mitterrand, ouverte en 1996.

Elle a été impulsée en 1988 et présentée comme devant être « l'une ou la plus grande et la plus moderne bibliothèque du monde » (intervention du 14 juillet 1988).

C'était sans compter sur Internet et son développement fulgurant. Elle est devenue un symbole du passé, stockant des livres à la lumière et ignorant la numérisation à sa conception : la dernière grande bibliothèque du monde.

Le rail est semblable au livre

Chacun s'accorde à penser que la construction des LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Pau sont des non-sens économiques en plus de déstabiliser des vignobles.

D'ailleurs, globalement, le TGV est une charge, que ce soit pour la SNCF ou anciennement pour RFF. Comble d'ironie, Paris-Bordeaux coûte moins cher en bus ou en avion qu'en train. De même, chaque ligne de tramway en France a coûté environ 300 à 400 millions d'euros dont les municipalités savent qu'elles sont des charges. Effet pervers des tramways de villes de province, comme à Clermont-Ferrand, plutôt que de contribuer à la diminution du trafic automobile, ils ont encouragé l'étalement urbain pavillonnaire qui est une catastrophe écologique (consommation de terres agricoles et multiplication du parc automobile).

Le rail est né de l'anthropocène, de la machine à vapeur de James Watt.

L'anthropocène a développé la ville, le salariat et la pollution, et a réduit les distances. Et l'anthropocène prend fin.

La pollution est combattue, le salariat devient une option, la ville est installée, la réduction des distances pourrait devenir un luxe. Le rail coûte cher à entretenir.

Les accidents de Brétigny, de Philadelphie et bien d'autres encore montrent l'insuffisance de l'entretien du rail et son dépassement technique. Le rail est sans doute le moyen de transport le plus cher à installer, à entretenir, à faire évoluer.

C'est le système de transport le plus rigide. L'échec du fret par rail en France en est la démonstration singulière. Faut-il multiplier des lignes comme les RER de Paris ? Dépassées ? Imaginons le monde de 2030 et ne posons plus de rail.

Je repars en plongée.

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L'ouvrage le plus récent de Philippe Cahen :
Les Secrets de la prospective par les signaux faibles, Éditions Kawa, 2013

À découvrir aussi sa contribution à l'ouvrage collectif Rupture, vous avez dit disrupture ? Le futur est déjà derrière nous, Éditions Kawa, 2015.