"N'importe quoi"

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Par Jacques Rosselin, directeur de la rédaction de La Tribune.

"La Tribune dit n'importe quoi". C'est ainsi que François Fillon avait sobrement commenté notre information, donnée il y a un peu plus d'une semaine, sur la menace d'une mise sous surveillance négative de la France par Standard & Poor's. On passera pudiquement sur la réaction du chef économiste français de l'agence de notation en cause, Jean-Michel Six, pour lequel nous n'étions qu'un quotidien "en mal de tirage", critique qui prend tout son sens lorsqu'elle est proférée par un responsable d'une entreprise qui a vécu grâce à des notations complaisantes accordées à des produits financiers aussi sûrs que les subprimes ou qui gratifiait, il y a peu, son client Dexia, aujourd'hui en faillite, d'un satisfecit...

Cette information, dénichée et vérifiée avec soin par notre rédaction, a été confirmée hier soir par le "Financial Times " et publiée à la une du quotidien anglo-saxon. C'est peu de dire que notre prestigieux confrère suscite beaucoup plus de timidité et de nuance dans la réaction chez le Premier ministre. Devant l'Assemblée nationale, il a tout d'abord noté ce mardi que l'avertissement de S&P "était collectif ". Il concerne certes quinze pays de la zone euro dont l'Allemagne, mais la menace de dégradation de notre triple A est la seule à porter sur deux crans et non un.

François Fillon a aussi évoqué "le mode de raisonnement immédiat et brutal" des agences, oubliant qu'il avait tout bonnement déclaré la France "en faillite", à peine arrivé à Matignon. Il a ensuite plaidé pour la généralisation de la règle d'or et une stricte discipline budgétaire, alors qu'il vient de signer un budget basé sur des prévisions de croissance qu'il sait surestimées, assorti d'un plan de rigueur dont la timidité nourrit la défiance des marchés et celle des agences de notation. Les gouvernements et les médias d'informations ne font pas le même métier, mais ils ont un point commun : lorsqu'ils s'obstinent à raconter n'importe quoi, ils finissent par le payer cher.