L'Europe, joker électoral de Sarkozy

Par jrosselin@latribune.fr  |   |  339  mots
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Par Jacques Rosselin, directeur de la rédaction

La crise financière de 2011 aura eu au moins un mérite : celui d'achever l'Europe de Lisbonne, échafaudage baroque et branlant, construit en une vingtaine d'années, fait de l'empilement de traités, dont un rien moins que « constitutionnel ». Elle n'aura convaincu personne, à commencer par les rares peuples consultés. Les institutions et ses représentants, qu'il s'agisse de la Commission ou du Parlement, ineptes ou inaudibles pendant cette période, ont largement ouvert la voie au retour d'une Europe des nations fonctionnant sur le bon vieux mode intergouvernemental autour du tandem franco-allemand. La Grande-Bretagne aurait pu se réjouir de ce tournant, méfiante qu'elle est de la bureaucratie communautaire. Mais elle s'est, pour le moment, maladroitement mise à l'écart de l'établi sur lequel France et Allemagne vont remettre la construction européenne. La version précédente, somme toute, lui convenait : sa monnaie était préservée, les thèses libérales qui lui sont chères prévalaient à Bruxelles et l'élargissement précipité à 27 lui avait apporté de nouveaux alliés et éloigné le spectre d'une Europe politique. Mais tout risque de changer dans les mois qui viennent. Nicolas Sarkozy, à quatre mois de l'élection présidentielle, pourrait se saisir de cette opportunité historique et en faire un thème de campagne plus convaincant, et certainement plus « présidentiel », que les thématiques de l'immigration et de la sécurité, usées jusqu'à la corde, ou celle du chômage, qui ne convainc plus. Il ne s'agit pas de faire campagne sur la règle d'or. De ce côté, l'affaire est entendue depuis longtemps. Le Pacte de stabilité avait du reste inscrit depuis longtemps l'austérité dans l'ADN communautaire. Il s'agit de pousser au bout son idée d'Europe à deux vitesses et de refonder l'union autour d'un groupe réduit de pays partageant une même gouvernance économique. Faire cette avancée décisive et poser son nom au bas d'un nouveau traité pourraient peser fortement dans l'élection française. Et bien au-delà.