Alstom : défense et illustration de « Nono la soudure »

Une autre lecture de l'action d'Arnaud Montebourg dans le triangle à quatre coins formé entre Alstom, General Electric, l'Etat et Bouygues...
Philippe Mabille

Oui bien sûr, nombreux sont ceux qui ne sauront pas résister à la tentation de moquer Nono le matamore, le ministre de l'Économie qui vient de dépenser plus de 2 milliards d'euros pour imposer l'État au capital d'Alstom aux côtés de General Electric dans une construction baroque issue de deux mois de tergiversations.Deux milliards pour rien, entend-on, qui auraient certes pu être plus utilement dépensés ailleurs, dans une France en panne d'investissements, et où la sphère publique peine à réaliser les 50 milliards d'économies. Oui, il est amusant à voir un pouvoir « socialiste » jouer aux banquiers et aux avocats d'affaires (Arnaud Montebourg est avocat...) et transformer l'État stratège en vulgaire fonds d'investissement. Celui qui a dit à la finance qu'elle était « son principal adversaire » vient de procéder à quatre cessions d'actifs publics, dont 3,1 % du capital de GDF-Suez, pour financer l'achat d'un strapontin au conseil d'un nouvel Alstom aux contours encore flous.

La Bourse a d'ailleurs sanctionné pour l'instant ce comportement fantasque en dévaluant immédiatement la valeur des principales participations de l'État dans des entreprises, y compris celle d'EDF, victime aussi du coup de Jarnac de Ségolène Royal qui a annulé d'un trait de plume la hausse annoncée du prix de l'électricité, qui n'est que reportée à l'automne compte tenu des coûts gigantesques à venir de la rénovation des centrales nucléaires. Comment mieux dire les incohérences d'un État partagé entre son cerveau gauche, qui défend l'emploi et le pouvoir d'achat, et son cerveau droit qui tente de protéger son portefeuille.

Arnaud Montebourg a néanmoins réalisé avec cette affaire un beau coup politique. Il s'impose comme le nouveau héros de la gauche alternative à Hollande et à Valls, une « vraie » gauche qui en a, et qu'il veut rassembler dans la perspective de ses futurs combats électoraux. Il y a une lecture politique évidente de l'affaire Alstom. En cédant au vrai-faux chantage à la démission de leur ministre, le président et le Premier ministre ont reconnu leur faiblesse sur son terrain. Et ont accordé une victoire aux poings à la main qui veut les battre aux primaires de la présidentielle de 2017. Et le beau cadeau fait à Bouygues, propriétaire de TF1, pourrait bien servir un jour les intérêts de celui qui ne se voit pas d'autre ambition que l'Elysée.

Enfin, il y a une dernière lecture possible de cette histoire, géopolitique, sur cette première "nationalisation" d'Arnaud Montebourg qui a réalisé dans cette affaire d'industriels une soudure improbable et inattendue. Avec cet anti-Florange, le ministre de l'Économie ne cherche pas seulement à effacer par un capitalisme à la chinoise le propos malheureux de Lionel Jospin - « l'État ne peut pas tout ». Il affirme aussi le retour nécessaire de l'État comme vecteur d'équilibre dans une nouvelle mondialisation qui voit la puissance dominante, les États-Unis, chercher à tout prix à consolider ses positions en Europe face à la montée de la Chine, qui sera dès la fin de cette année la première économie mondiale par le PIB, selon de nouveaux calculs du FMI. Même s'il y a à prendre et à laisser dans la nouvelle « grammaire des affaires à la française », le fait que « l'Américain » GE ait accepté si facilement cette « alliance » improbable avec l'État socialiste français en dit long sur le changement d'époque et l'appétit d'acquisition des grandes multinationales apatrides. Il va donc sans doute falloir s'habituer à voir les États intervenir, en défense, dans une bataille qui ne fait que commencer et s'étendra bientôt à d'autres secteurs : la santé, les services urbains, le transport, la finance, demain l'université peut-être.

Le grand mérite du rapport sur « La France dans dix ans », remis ce mercredi à François Hollande, est de montrer que dans ce monde en mutation, où l'Europe affaiblie et divisée est une cible, et la France, en panne, encore plus avec ses belles entreprises mondiales, il est crucial pour un pays d'avoir une stratégie à long terme. Les États-Unis en ont une, l'Allemagne en a une, le Japon et la Chine aussi. La France a trop souffert ces dernières années de ce manque, pour pouvoir se passer d'en choisir une, de la mettre en oeuvre et de s'y tenir, quels que soient les aléas des élections.

Philippe Mabille

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Commentaires 7
à écrit le 30/06/2014 à 6:46
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le branquignol du gouvernement qui croyait pouvoir réaliser son reve : faire le buzz.

à écrit le 30/06/2014 à 1:16
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article digne d'une gamin en 8e, mais qu'importe, le journaliste aussi incompétent sera tout de même payé !!!!

à écrit le 29/06/2014 à 19:06
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Sauf que la partie la plus intéressante chez Alstom, les turbines, part chez GE et que la partie transport dont personne ne voulait tant elle risque d'être encore plus déficitaire dans les années a venir avec la concurrence asiatique , est celle ou l...

à écrit le 28/06/2014 à 15:41
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monte bourge ou l'incarnation de l'inutilité !!!

à écrit le 28/06/2014 à 10:17
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Le cirque Pinder t'attend pour commencer la tournée d'été, ta caravane est prête et costume de clown t'attend.

à écrit le 28/06/2014 à 6:09
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Franchement, article médiocre. Arnaud Montebourg est avocat, donc avocat d'affaires ? ET c'est la raison pour laquelle il se même de la vie des entreprises, ce n'est pas la nature même de ses attributions qui l'y conduit ? Royal a annulé la hausse du...

le 28/06/2014 à 8:30
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Mettre 2 milliards pour rien quel interet

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