Quand la recherche médicale est facteur de croissance

Claude Bertrand est vice-président exécutif "Recherche et développement" chez Ipsen et président d'Ariis (Alliance pour la recherche et l'innovation des industries de santé).
Jean Chiscano

La recherche et l'innovation préparent la croissance économique de demain. Cette conviction anime les industriels de la santé à l'aube d'un rendez-vous majeur avec l'Etat. Fin janvier, doit se tenir le cinquième Conseil stratégique des industries de santé (CSIS), qui vise à renforcer l'attractivité de la France dans les domaines de la pharmacie, des biotechnologies et des technologies médicales. Avec 65 milliards d'euros de chiffre d'affaires, dont 8% consacrés à la recherche et au développement, et plus de 210.000 emplois directs, l'industrie de santé porte en elle non seulement une très grande valeur économique, mais aussi et surtout l'espoir du progrès thérapeutique. C'est ce qu'ont permis de rappeler les premières réunions du CSIS, initié en septembre 2004.

Les CSIS ont été à l'origine de mesures spécifiques comme la création du fonds Innobio pour financer des start-up de biotechnologie et l'Institut virtuel des métiers de santé, qui anticipe les besoins de compétences des industriels du secteur. Le dernier CSIS d'octobre 2009 a encouragé la création d'Ariis, l'Alliance pour la recherche et l'innovation des industries de santé que je représente, et qui permet aux industriels de santé de développer les partenariats public-privé et privé-privé porteurs des innovations de demain.

L'élan donné à la recherche s'est également concrétisé grâce aux investissements d'avenir (IA). Ceux-ci ont financé depuis leur lancement en 2010 pour plus de 2 milliards d'euros de projets structurants liés à la santé, la plupart s'appuyant sur des partenariats forts avec les industriels du secteur. Enfin, deux dispositifs doivent être salués : le crédit d'impôt recherche (CIR) qui, selon une étude récente de l'Association nationale de la recherche et de la technologie, a un effet levier avéré, avec 2 à 4 euros de croissance de PIB attendus pour 1 euro de CIR versé ; et le statut de jeune entreprise innovante (JEI) dont les avantages fiscaux ont bénéficié en 2010 à plus de 2.000 PME de moins de quinze ans.

Mais des menaces intrinsèques pèsent sur cette filière, qui affronte la perte de brevets de molécules essentielles et une productivité de sa R&D plus difficile à maintenir. Elle se trouve démunie face aux menaces inattendues et cumulatives telles que certains dispositifs de la loi de renforcement de la sécurité sanitaire des produits de santé et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2012. À titre d'exemples, citons les restrictions concernant les autorisations temporaires d'utilisation (ATU), qui pourraient limiter l'accès précoce de certains malades à des technologies et des médicaments innovants, ou une politique visant à alourdir les contraintes financières pesant sur les industries des produits de santé. Dans un contexte de grande concurrence entre les pays, ces mesures comportent un risque de fragilisation de la compétitivité de la France et de détournement des investissements vers d'autres régions du monde.

D'autre part, on ne peut que démentir les propos qui tendent à considérer le crédit d'impôt recherche et le statut de jeune entreprise innovante (JEI) comme des niches fiscales, à l'heure où les plus grands économistes s'accordent à dire que nos économies sont condamnées à la récession, sauf à créer de nouvelles activités industrielles.

Les industriels attendent beaucoup de la prochaine réunion du CSIS. La recherche partenariale, y compris la recherche clinique, doit être encouragée, son mode de mise en oeuvre encore simplifié. Les filières industrielles nouvelles doivent être soutenues : bioproduction, thérapie cellulaire, télémédecine et médecine personnalisée. Ce sont les traitements de demain mais également les emplois industriels de demain qui sont en jeu. Les formations à mettre en oeuvre pour répondre à ces besoins nouveaux doivent être anticipées en coopération avec les industriels.

Il n'y aura pas de croissance économique dans nos pays sans activité industrielle ni recherche et innovation. Convaincues que le terreau scientifique et médical français constitue un réel atout qu'il faut encourager et non desservir par des mesures inappropriées, les industries de santé présentes sur le territoire sont prêtes à jouer leur rôle d'entreprises citoyennes et responsables.

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